Geste douloureux et générateur d’anxiété, trop souvent banalisé ; les publications récentes confirment le niveau élevé de douleur engendré (score médian de douleur à 3/4 sur la NFCS, 9 ou 10/21 au score PIPP, ou 9/10 au score FLACC selon les études).
Le passage de la choane et du carrefour oropharyngé sont les étapes les plus douloureuses, l’ensemble du geste reste très désagréable (générateur de nausées, voire vomissements, et malaise chez le tout-petit).


Préambule
Regrouper les soins afin de limiter les moments douloureux et éviter de réveiller l’enfant, respecter son rythme, sauf contrainte inévitable.
Organiser et réaliser le soin avec les parents autant que possible.


Avant le soin
S’informer sur

  • La nécessité du soin. Lorsqu’un nouveau-né ou prématuré ôte sa sonde d’alimentation : réévaluer l’état général de l’enfant (intensité de la douleur et /ou de la fatigue), la qualité de la succion et de la déglutition, pour réintroduire si possible l’alimentation au sein, à la seringue ou au biberon.
  • L’état de base de l’enfant. En cas de douleur « de fond », traiter et reporter le soin après le soulagement.
  • Le déroulement des soins précédents. L’enfant a-t-il déjà eu une pose de sonde nasogastrique dans de bonnes conditions ? Si oui, reproduire les étapes. Si non, évaluer ce qui s’est mal passé et réadapter : « Comment ça s’est passé les autres fois ? Comment veux-tu qu’on fasse ? Peut-on refaire le soin comme la dernière fois ou faut-il prévoir autrement ? »

 

Informer l’enfant et sa famille

  • Expliquer le déroulement du soin et les moyens d’analgésie qui seront utilisés, en adaptant son langage à l’âge et à la compréhension de l’enfant. Le geste peut être expliqué sur une poupée pour rendre l’information plus ludique et plus explicite.
  • Demander à l’enfant comment il veut être accompagné, s’il préfère être informé du déroulement au fur et à mesure du geste ou être distrait : choisir dans ce cas un moyen de distraction avec lui.
  • Il est indispensable de s’adresser à l’enfant dès la période néonatale.

 

Organiser le geste
Préparer l’ensemble du matériel ainsi que les moyens antalgiques à utiliser pour ne pas avoir à interrompre le soin.

  • Sondes en polyuréthane ou en PVC.
  • MEOPA + si possible masque troué pour laisser passer la sonde (masque à fibroscopie), sinon masque habituel (assez large pour que l’enfant puisse garder sa tétine).

  • Lubrifiant (gel ou spray), sauf si sonde pré-lubrifiée.
  • Gel type Silisonde® ou spray, ou huile de vaseline selon le protocole de service, à défaut eau), sauf si sonde pré-lubrifiée.
  • Pour les plus de 6 ans : gel ou spray de lidocaïne.
  • Pour les nourrissons : tétine à biberon trouée dont l’orifice est suffisant pour passer la sonde gastrique (tétine de type 3 vitesses). Cela permet au nourrisson d’avaler la sonde plus aisément en tétant.
  • Solution sucrée : saccharose 24 % ou G30 % chez le nouveau-né jusqu’à 3 mois, > 24 %  si possible chez le nourrisson jusqu’à 18 mois (solution hypersucrée à 50 voire 75%)(se reporter au protocole).
  • Pansement hydrocolloïde pour protéger la peau au niveau de la fixation de la sonde.

 

 


Pendant le soin
Installation/accompagnement

  • Choisir la position avec l’enfant et ses parents. Éviter au maximum d’allonger l’enfant d’emblée (sauf contrainte inévitable) : privilégier la position assise ou en proclive, tête soutenue légèrement inclinée vers l’avant au moment de la pose.

 


Extrait des fiches Quand chacun trouve sa place — Association SPARADRAP

  • Assurer un environnement calme.
  • Rester centré sur l’enfant avec des échanges rassurants et ludiques tout le long du soin.
  • Donner un rôle actif aux parents : réassurance par le contact visuel, verbal et physique, et distraction. En leur absence c’est un soignant qui accompagne l’enfant.
  • Encourager l’enfant à participer s’il le souhaite, lorsque son âge et son état le permettent.
  • Le bébé (prématuré, nouveau-né ou nourrisson) peut être porté dans les bras ou enveloppé dans un lange (regroupement des 4 membres, sans contention). Le peau à peau peut aussi être proposé.

 

Mise en place de l’analgésie
Pour l’enfant jusqu’à 18 mois :

  • Utilisation de solutions sucrées ou hypersucrées, associée à la succion non nutritive 2 minutes avant de débuter le geste.

 

Pour l’enfant à partir de 4 mois :

  • Débuter l’inhalation du MEOPA 3 minutes avant le début du geste. Utiliser si possible un masque à fibroscopie (qui comporte un trou pour passer la sonde sans interrompre l’administration). En l’absence de ce type de matériel, débuter l’inhalation nez + bouche et déplacer le masque sur la bouche ou sur le nez au moment de la pose de la sonde, quand l’enfant est détendu.
  • À partir de 6 ans : associer une application locale de lidocaïne dans la narine, 5 minutes avant le geste, sur prescription médicale (hors AMM, recommandé dans les RBP antalgiques chez l’enfant — Afssaps 2009). Attention ne pas anesthésier le pharynx, risque de fausse route. Ne pas dépasser 2 mg/kg de lidocaïne : Xylocaïne® visqueuse à 2 % (1 mL = 20 mg) ou spray à 10 % (1 pulvérisation = 9 mg).

 

Réalisation du geste

  • Agir avec dextérité et douceur, sans forcer.
  • Pendant la descente de la sonde, quel que soit l’âge de l’enfant, respecter son rythme de déglutition, faire téter ; pour la pose orale, faire glisser la sonde dans la tétine de biberon trouée.
  • Favoriser la participation de l’enfant, faire avaler un peu de liquide si possible.
  • Associer la distraction et des suggestions qui favorisent la déglutition.
  • Protéger la peau lors de la fixation de la sonde afin de prévenir la survenue d’une escarre (aile du nez) : poser au niveau de la lèvre supérieure, et au niveau de la joue, un pansement hydrocolloïde (type Comfeel®, taille du pansement supérieure à celle de l’adhésif qui sera ensuite collé sur celui-ci). Chez le prématuré, éviter de fixer en périoral, fixer sur la joue uniquement en respectant la courbe prise par la sonde.

 

  • Fixer par une moustache sur le pansement hydrocolloïde et réaliser un retour de fixation (boucle avec la sonde pour éviter le retrait accidentel).

 

 


Après le soin

  • Réinstaller l’enfant confortablement.
  • Évaluer la douleur.
  • Évaluer la satisfaction du geste : « Serais-tu d’accord pour refaire le soin dans les mêmes conditions ? »
  • Traçabilité : le geste, les moyens antalgiques mis en place et leur effet sont notés dans le dossier de soins.

 

 


Références

  • Singer AJ, Richman PB, Kowalska A, Thode HC, Jr. Comparison of patient and practitioner assessments of pain from commonly performed emergency department procedures. Ann Emerg Med 1999 ; 33 (6) : 652-8.
  • Babl FE, Goldfinch C, Mandrawa C, Crellin D, O’Sullivan R, Donath S. Does nebulized lidocaine reduce the pain and distress of nasogastric tube insertion in young children ? A randomized, double-blind, placebo-controlled trial. Pediatrics 2009 ; 123 (6) : 1548-55.
  • Nott MR, Hughes JH. Topical anesthesia for the insertion of nasogastric tubes. Eur J Anesthesiol 1995 ; 12 : 287-90.
  • Wolfe TR, Fosnocht DE, Linscott MS. Atomized lidocaine as topical anesthesia for nasogastric tube placement : A randomized double-blind, placebo-controlled trial. Ann Emerg Med 2000 ; 35 : 421-5.
  • Cullen L, Taylor D, Taylor S, Chu K. Nebulized lidocaine decreases the discomfort of nasogastric tube insertion : A randomised, double-blind trial. Ann Emerg Med 2004 ; 44 (2) : 131-7.
  • Kuo YW, Yen M, Fetzer S, Lee JD. Reducing the pain of nasogastric tube intubation with nebulized and atomized lidocaine : a systematic review and meta-analysis. J Pain Symptom Manage 2010 ; 40 (4) : 613-20.

 

 

 

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