OBJECTIF
Diminuer voire supprimer la douleur provoquée par les soins chez l’enfant de moins de 4 mois (voire 6 mois) grâce à l’administration d’une solution sucrée (saccharose ou glucose) associée à la succion non nutritive (SNN).
PERSONNES CONCERNÉES
- Infirmiiers (infirmières) et infirmiiers (infirmières) spécialisé(e)s
- Auxilliaires de puériculture, aides-soignant(e)s
- Technicien(ne)s de laboratoire, de radiologie, des explorations fonctionnelles, de médecine nucléaire, d’EEG, etc.
- Sages-femmes
- Médecins
- Kinésithérapeutes, psychomotricien(ne)s
DÉFINITION
- Chez le nouveau-né et le nourrisson âgé de moins de 4 mois (voire 6 mois), l’administration de solution sucrée (saccharose entre 24 et 30 % ou glucose 30 %) déposée sur la langue diminue ou fait disparaître la douleur induite par un geste invasif mineur. Cet effet analgésique apparaît dans les 60 à 120 secondes suivant l’administration de la solution sucrée et dure environ 5 à 7 minutes. L’effet est lié au goût sucré, il est probablement médié par la sécrétion de morphine endogène. C’est un « complément » antalgique qui ne remplace pas les mesures habituelles : nursing, antalgiques, crème anesthésiante.
- L’allaitement au sein a le même effet antalgique.
DESCRIPTION
Produit
- Soit préparation journalière de saccharose entre 24 et 30 % stockée dans un réfrigérateur puis jetée après 24 heures.
- Soit préparation du commerce de saccharose à 24 % (différents laboratoires) : pour un enfant et pour un soin, à jeter après ouverture si unidose, à stocker au réfrigérateur et jeter après 24 heures si multidose.
- Soit ampoules de glucose à 30 % pour un enfant et pour un soin, à jeter après ouverture.
Indications
Mise en garde : Pour certains gestes, la solution sucrée est recommandée mais insuffisante et doit être associée à d’autres moyens antalgiques (crème anesthésiante, etc.). Pour tous les soins, un effet antalgique insuffisant peut conduire à :
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Sur prescription médicale ou dans le cadre d’un protocole de service
- Tout soin, source de douleur.
- Effraction cutanée : ponction veineuse, prélèvement capillaire au talon ou au doigt (à réaliser à l’aide de lancette à ressort ou de stylo autopiqueur, proscrire les lancettes à main), injection intramusculaire (vaccination, etc.), injection sous-cutanée, pose d’une voie d’abord périphérique ou centrale, ponction lombaire (associer à l’application de crème anesthésiante, cf. protocole) injection intradermique, intradermoréaction (IDR).
- Pose d’une sonde gastrique, d’une sonde urinaire, etc.
- Aspiration rhino-pharyngée, aspiration trachéale.
- Pansement.
- Ablation d’un pansement adhésif.
- Ablation d’un adhésif (ex : poche à urine).
- Mobilisation du bébé potentiellement douloureuse : toilette, change, pesée, etc.
- Examen clinique douloureux (examen des hanches par exemple).
Contre-indications
- Contre-indications absolues
- Atrésie de l’œsophage et fistule œsotrachéale non opérées.
- L’intolérance connue au fructose est une contre-indication absolue au saccharose, le glucose est quant à lui autorisé.
- Contre-indications relatives
- Suspicion d’entérocolite.
- Troubles de déglutition.
Le jeûne n’est pas une contre-indication.
Effets indésirables
- Désaturations brèves et réversibles le plus souvent spontanément, surtout chez le très petit prématuré, surtout si l’administration dans la bouche est trop rapide.
- Les solutions sucrées ne modifient pas la glycémie.
Matériel
- Seringue entérale de 1 mL ou dosette.
- Tétine.
Déroulement du soin
- Préparer le matériel nécessaire au soin.
- Installer l’enfant confortablement (regroupement des 4 membres, cocon, etc.), lui parler, expliquer le soin aux parents.
- Commencer à faire téter le bébé avant de débuter l’administration de la solution sucrée.
- Déposer la solution sucrée sur la pointe de la langue (à l’aide d’une seringue entérale de 1 mL ou de la dosette), goutte par goutte, 2 minutes avant le geste douloureux.
- Le délai de 2 minutes doit impérativement être respecté pour obtenir une réelle efficacité.
- Faire téter une tétine au bébé pendant toute la durée du soin.
- Si dès la désinfection de la peau, l’enfant manifeste un mouvement de retrait, redonner la dose.
- Renouveler l’administration si le soin se prolonge au-delà de 5 minutes car l’effet disparaît après ce délai.
Posologie
Poids | Quantité de solution sucrée |
≤ 1 000 g | 1 à 2 gouttes soit 0,05 à 0,1 mL |
De 1 000 à 1 500 g | 3 à 4 gouttes soit 0,15 à 0,2 mL |
De 1 500 à 2 000 g | 5 à 7 gouttes soit 0,25 à 0,35 mL |
≥ 2 000 g | 8 à 10 gouttes soit 0,4 à 0,5 mL |
- Fréquence des prises dans la journée : 6 à 8 fois par jour.
- Ces posologies en fonction du poids sont indicatives. Les enfants présentant un retard de croissance intra-utérin peuvent avoir besoin de posologies plus importantes.
- Une posologie jugée efficace lors d’un soin pour un enfant peut d’emblée être utilisée pour ce même enfant lors du soin suivant.
- Pour le nouveau-né à terme ou le nourrisson, il ne semble pas y avoir d’avantage à augmenter la posologie, mais renouveler selon les réactions de l’enfant (l’important c’est le goût sucré dans la bouche).
Remarques
- Saccharose et glucose à 30 % sont équivalents en termes de puissance antalgique.
- Les études prouvent qu’il existe une synergie d’action entre l’administration de la solution sucrée et la succion d’une tétine. L’efficacité de cette association est supérieure à l’utilisation d’une tétine seule ou de la solution sucrée seule.
- Si l’utilisation d’une solution sucrée est contre-indiquée, on peut utiliser la succion non nutritive seule (c’est-à-dire faire téter une tétine) 2 minutes avant le geste et pendant toute la durée du geste, en renforçant les autres mesures antalgiques (cocon, contact ou peau-à-peau, bercement, regroupement des 4 membres).
- L’utilisation de la solution sucrée doit être notée dans le diagramme de soins de l’enfant (heure, volume) ainsi que les effets observés et l’efficacité.
- L’allaitement maternel produit une analgésie physiologique du même ordre que l’administration d’une solution sucrée + succion. Le même délai de 2 minutes doit être respecté entre le début de la tétée et la réalisation du soin.
- L’utilisation d’une solution sucrée ne doit pas être banalisée. Elle doit être utilisée pour les gestes douloureux. Pour les gestes stressants, la succion non nutritive peut suffire.
DOCUMENT ASSOCIÉ
RÉFERENCES
- Charte de l’enfant hospitalisé du 13.05.1986, article 5 : « on évitera tout examen ou traitement qui n’est pas indispensable. On essaiera de réduire au maximum les agressions physiques ou émotionnelles et la douleur ».
- Circulaire n° 9984 du 11.02.1999 relative à la mise en place de protocole pour la prise en charge de la douleur aiguë.
- Walter E. Crème anesthésiante et solutions sucrées chez le nouveau-né : où en sommes-nous ? Actes du colloque « La douleur de l’enfant, quelles réponses ? ». Paris ; 2010.
- Stevens B et al. Sucrose for analgesia in newborn infants undergoing painful procedures. Cochrane Database Syst Rev 2010 ; 20 (1) : CD001069.
- Kassab M et al. Sweet tasting solutions for needle related procedural pain in infants to one month to one year (review). Cochrane Database Syst Rev 2012 ; 12 : CD008411.
- Afssaps. Recommandations de bonne pratique : Prise en charge médicamenteuse de la douleur aiguë et chronique chez l’enfant. Juin 2009.
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