Alternatives à la contention des enfants lors des soins
Coyne I, Scott P.
Alternatives to restraining children for clinical procedures
Nurs Child Young People 2014 ; 26 (2) : 22-7

Dans les services de pédiatrie, la contention pour réaliser les soins semble être une pratique fréquente plutôt qu’exceptionnelle La différence entre la restriction physique et le maintien dit thérapeutique semble dépendre de deux facteurs : du degré de force utilisée et du consentement ou non de l’enfant.
Situations cliniques pour lesquelles
la contention est observée
Catégories Types de procédures
Soins infirmiers
  • Intraveineuse
  • Pose de cathéter périphérique
  • Pansement
  • Pose de sonde nasogastrique
  • Soins de trachéotomie
  • Pose de sonde urinaire
  • Administration de médicaments
  • Injections
  • Injection dans une chambre implantable

 

Procédures médicales
  • Myélogramme
  • Endoscopie
  • PL
  • Sutures
  • Soins dentaires

 

Procédures diagnostiques
  • Radiographie
  • Échographie
  • IRM

 

Les situations où la contention excessive risque d’être employée sont banales et fréquentes dans les lieux de soin, des gestes où le niveau de douleur est variable, mais où une certaine immobilité de l’enfant est requise.
La contention peut avoir des conséquences émotionnelles et psychologiques négatives sur les enfants, les parents et les infirmières. Les professionnels doivent évaluer leur pratique quotidienne quant à l’usage de la contention lors des soins et employer systématiquement des stratégies qui favorisent la coopération des enfants. La contention ne doit être utilisée que lorsqu’il n’y a aucune autre alternative et seulement lorsqu’il existe un risque vital. Il est essentiel que tous les hôpitaux pédiatriques aient une politique explicite et améliorent la formation et les recommandations sur ce sujet.
Au regard de l’étude de la littérature, les auteurs déclarent que la décision de recourir à la contention dépend plus des croyances individuelles et de critères subjectifs que d’une analyse de la situation.
Actions proposées pour réduire le risque de contention
Étapes des soins Actions
Avant le soin
  • Parler à l’enfant pour évaluer la maturité de son développement.
  • Chercher à connaître ce qu’il aime.
  • L’encourager à poser des questions et à exprimer ses sentiments et son anxiété.
  • Fournir de l’information adaptée à son âge.
  • Expliquer ce qu’il va voir, entendre et sentir au cours de la procédure.
  • Expliquer les étapes de la procédure.
  • Dire « ça va faire mal » si c’est le cas.
  • Négocier le moment avec l’enfant pour effectuer le soin.
  • Offrir des options et des choix lorsque cela est possible, par exemple la couleur ou le type de médicament différent.
  • Faire une démonstration du soin sur un jouet.
  • Laisser l’enfant jouer avec l’équipement. Il peut utiliser le matériel sur une peluche ou une poupée.
  • Expliquer différentes techniques d’adaptation, par exemple utiliser la distraction, participer au soin, se relaxer, écouter une histoire ou de la musique, faire des bulles, compter, contrôler sa respiration.
  • S’informer et utiliser la stratégie d’adaptation préférée de l’enfant et de sa famille.
  • Utiliser une crème anesthésiante une heure avant la ponction veineuse.
  • Fournir des informations aux parents , y compris sur la façon de soutenir leur enfant.
  • Expliquer aux parents comment ils peuvent aider leur enfant s’ils souhaitent être présents au cours de la procédure.
  • En cas de détresse majeure de l’enfant lors du soin, penser à utiliser la sédation.
Pendant le soin
  • Maintenir une atmosphère calme et détendue positive.
  • Utiliser les techniques de distraction préférées de l’enfant, par exemple discuter, regarder au loin, imaginer quelque chose, la musique.
  • Aider l’enfant en utilisant la technique d’adaptation préférée, par exemple la distraction ou la participation, la relaxation, histoires, musique, faire des bulles, compter, contrôler la respiration.
  • Fournir des explications simples tout au long de la procédure.
  • Respecter le rythme de l’enfant.
  • Tenir compte de sa préférence pour l’installation lorsque cela est possible.
  • Lui dire de tousser pendant une insertion d’aiguille car cela peut parfois aider.
  • Encourager le parent à réconforter l’enfant.
  • Certains enfants préféreront peut-être regarder alors que la procédure est en cours et/ou participer activement.
  • Pour les nourrissons, l’utilisation de la solution sucrée ou l’allaitement peut soulager lors de soins douloureux de courte durée.

 

Après le soin
  • Faire un débriefing avec la famille et l’enfant.
  • Encourager l’enfant à exprimer ses sentiments.
  • Rassurer et féliciter.
  • Penser à donner un certificat ou une récompense.
  • Faire une évaluation critique de la situation et repérer ce qui pourrait être amélioré si nécessaire.
  • Demander aux parents s’ils ont des idées ou des conseils.
  • Noter ce qui a aidé l’enfant à faire face à la procédure de sorte que ces actions puissent être utilisées à nouveau.

 

 

Commentaire Pédiadol : La problématique de l’excès de contention lors des soins est croissante. Lorsque la force employée pour maintenir un enfant qui résiste et ce débat devient violence, c’est le moment d’arrêter le soin et de réfléchir aux alternatives. Cet article très pratique va y contribuer. Il est malheureux que parallèlement, un article détaillant l’enveloppement dans une alèze en bloquant les bras en arrière puisse être publié (Brown JC, Klein EJ. The « Superhero Cape Burrito » : a simple and comfortable method of short-term procedural restraint. J Emerg Med. 2011 ; 41 (1) : 74-6). Même s’il est nécessaire que l’enfant soit immobile pour certains soins, l’enveloppement serré va produire une détresse qui dans la plupart des cas va aggraver l’agitation.

Faire des pauses au cours du soin : efficacité pour gérer le comportement au cours des soins dentaires
Allen KD, Wallace P.
Effectiveness of Using Noncontingent Escape for General Behavior Management in a Pediatric Dental Clinic
J Appl Behav Anal 2013 ; 46 (4) : 723-37

Cet essai randomisé contrôlé a concerné 151 enfants âgés de 2 à 9 ans. Ils étaient répartis en deux groupes. Ils recevaient soit les soins dentaires courants habituels soit les soins étaient réalisés en effectuant de courtes pauses. Le dentiste qui dispensait les soins dans ce groupe était équipé à la ceinture d’un petit équipement électronique (MotivAider) préalablement programmé qui envoyait de petites vibrations par intermittence. Huiit pauses étaient réalisées au total : les 4 premières étaient de 10 secondes et les 4 suivantes de 15 secondes. À chaque pause, le dentiste disait à l’enfant « c’est le moment de faire une pause ».
Les résultats ont montré que la réalisation de courtes pauses pendant le soin dentaire réduit significativement les manifestations comportementales gênantes et le recours à la contention chez les enfants qui reçoivent des soins dentaires. En outre, la méthode n’a pas augmenté la durée usuelle des soins dentaires. Ces résultats en s’ajoutant à ceux des études précédentes, suggèrent que la réalisation de courtes pauses au cours des soins dentaires est efficace, faisable et généralisable dans la pratique courante.

 

Commentaire Pédiadol : Faire des pauses systématiques, comme sans raison : voilà une idée inattendue mais productive ! Cette méthode peut s’avérer aussi utile dans des situations de soins plus difficiles, en dehors des soins dentaires.

Recommandations pour gérer la douleur des gestes de soin courants
Baxter A.
Common Office Procedures and Analgesia Considerations
Pediatr Clin North Am 2013 ; 60 (5) : 1163-83

Cet article reprend les recommandations générales de la prise en charge de la douleur provoquées par les soins. L’auteur, une pédiatre d’Atlanta, qui a travaillé toute sa vie sur le sujet, en particulier aux urgences, et développé différentes techniques (comme Buzzy), aborde en premier lieu les intrications entre la peur et la douleur. Elle met en avant l’importance de la préparation de l’enfant avant de réaliser le geste.
Un tableau récapitule les mots et les comportements qui réduisent la détresse et ceux qui l’aggravent :

  • les mots neutres ou qui réduisent l’anxiété : pression, serré, gêne, inconfortable, « pousser tube métallique » ;
  • les mots qui aggravent la détresse : « je suis désolée », aiguille, piqure, piquer, pincer, mal ;
  • les comportements neutres ou qui réduisent l’anxiété : prévenir avant de toucher, parler d’autre chose, humour, attitude chaleureuse ;
  • les comportements qui aggravent la détresse : excuses, punition, plusieurs adultes parlant en même temps à l’enfant, apitoiement.

 

L’installation de l’enfant pour le soin et la manière de maintenir doucement l’enfant sont illustrées par des photos où l’on peut voir qu’on laisse à l’enfant la possibilité de s’assoir, ou d’être assis sur les genoux du parent, installé de sorte que son regard soit attiré vers un objet de distraction.
Cet article traite également des médicaments de l’anxiolyse et de l’analgésie (midazolam, oxycodone associée à l’ibuprofène, fentanyl intranasal, morphine PO, gel anesthésiant LET, crème EMLA®, administration de solution sucrée, techniques de contre-stimulation).

Commentaire Pédiadol : L’article fait la synthèse mais il comporte des recommandations très pratiques, faciles à mettre en œuvre, qui témoignent de la grande expérience de l’auteur.

Interventions psychologiques pour réduire douleur et détresse des
piqûres chez lʹenfant et lʹadolescent

Uman LS, Birnie KA, Noel M et al.
Psychological Interventions for Needle‐Related Procedural Pain and
Distress in Children and Adolescents
Cochrane Database Syst Rev 2013 ; 10 : CD005179 (mise à jour des
versions de 2006 et 2008)
La méta-analyse de la Cochrane Collaboration publiée en octobre 2013 concernant les
interventions psychologiques utilisées pour réduire la douleur et de la détresse chez les enfants et
les adolescents lors des piqûres apporte des éléments de preuve intéressants en ce qui concerne la
distraction et l’hypnoanalgésie. Cette revue de la littérature a inclus 39 essais de qualité
méthodologique suffisante, ce qui représente 3 394 participants (tout en excluant 128 études de
qualité insuffisante). Les gestes les plus étudiés dans les essais contrôlés étaient la ponction
veineuse (13 études), la pose de voie veineuse (7 études), la vaccination (6 études), la ponction
lombaire (5 études), le myélogramme (2 études). Les études incluaient des enfants âgés de 2 à
19 ans, avec le plus de preuves disponibles pour les enfants de moins de 12 ans. Les
« interventions psychologiques » les plus étudiées pour les injections étaient la distraction (19 études), lʹhypnose (7 études) et les thérapies cognitivo-comportementales. Les auteurs
concluent qu’il existe globalement des preuves solides de lʹefficacité de la distraction et de
lʹhypnose pour la douleur et la détresse liée aux injections chez les enfants et les adolescents, avec
un effet plus important avec l’hypnose ; en revanche aucune preuve n’est actuellement
solidement acquise sur l’effet antalgique de la préparation et de lʹinformation (nombre d’études
insuffisant, méthodologies difficiles). Les auteurs notent qu’il persiste un défaut d’études
méthodologiquement fiables pour évaluer les interventions psychologiques pour prévenir la
douleur et la détresse liées aux injections.
Voir aussi une autre synthèse consacrée à la douleur des soins des nourrissons : Pillai Riddell R, Racine N,
Turcotte K et al. Non-Pharmacological Management of Infant and Young Child Procedural Pain. Cochrane
Database Syst Rev
2011 ; 10 : CD006275

 

Commentaire Pédiadol : Les preuves d’efficacité s’accumulent pour encourager à l’emploi ces
méthodes agréables pour l’enfant, le parent et le soignant : c’est une incitation forte à poursuivre
dans cette voie, sans oublier bien sûr d’associer les moyens habituels, crème anesthésiante,
solutions sucrées, MEOPA.
Des études supplémentaires sont nécessaires, malgré les difficultés méthodologiques, pour
comparer des méthodes car il n’est plus éthique aujourd’hui de comparer à un groupe placebo.

Gestion de la détresse provoquée par les soins chez les enfants et les jeunes : il est le temps d’adhérer aux recommandations
Duff AJ, Gaskell SL, Jacobs K, Houghton JM.
Management of distressing procedures in children and young people: time to adhere to the guidelines
Arch Dis Child 2012 ; 97 : 1-4

Cet article très complet revient sur les moyens disponibles pour prévenir la détresse et la douleur liées aux soins en pédiatrie, leur efficacité avec leur niveau de preuve. Les auteurs passent en revue les différentes interventions possibles : les recommandations réalisées par la Société britannique des psychologues de l’enfant concernent la préparation, l’installation, les stratégies d’adaptation et la conduite à tenir lorsqu’un soin se déroule mal. Présenté à l’aide de 3 tableaux principaux, cet article fait la synthèse des points importants à suivre AVANT et PENDANT le soin : ces tableaux 1 et 2 sont présentés en 2 colonnes avec en face des recommandations le raisonnement ou les preuves qui sous-tendent l’intérêt d’une telle procédure. L’apport principal, très original, est de présenter en tableau 3 la marche à suivre quand le soin se déroule mal.
Recommandations pendant le soin :

  • toucher l’enfant : caresser et frotter, masser produit une distraction physique ;
  • utiliser des techniques de respiration : « souffler pour chasser la douleur » ou faire imaginer que l’enfant souffle sur les bougies du gâteau d’anniversaire, ou faire des bulles de savon ;
  • utiliser des techniques de relaxation : techniques simples comme par exemple en faisant semblant d’être une poupée de chiffon ou une marionnette dont les cordes ont été coupées ou si personnel formé utiliser méthodes de relaxation musculaire et imagerie guidée pour les enfants plus grands.

 

 

Recommandations pour gérer la détresse de l’enfant lors d’un soin en 3 étapes
Étape Justification

Première réponse : faire une pause

Est-ce tu veux faire une pause ? Est-ce qu’on peut continuer le soin ?
Si c’est le cas, laisser l’enfant et les parents récupérer.
Essayer à nouveau, et reprendre le soin lentement.

Faire des pauses favorise la confiance et le sentiment « d’être écouté ».
L’enfant ou l’adolescent peut gérer le déroulement du soin grâce au répit qu’il trouve dans les pauses et dispose de plus de temps pour profiter du soutien et des encouragements de son entourage.

Deuxième réponse : la procédure doit-elle absolument être réalisée aujourd’hui ? NON

Si la procédure n’a pas besoin d’être immédiatement effectuée, une préparation et un « entrainement » est nécessaire.
Les recours principaux :

  • Faire intervenir l’éducatrice, la psychologue du service.
  • Organiser le soin de manière à combiner la relaxation, les autres stratégies de coping et une exposition progressive au soin.

 

Maintenir la confiance est primordial.
Prendre le temps de «recommencer» renforce la participation de l’enfant/adolescent dans ce qui leur arrive.

Troisième réponse : il est jugé cliniquement indispensable que la procédure soit réalisée le jour même

  1. La sédation doit être envisagée avant de recourir à une contention physique. La sédation consciente doit être utilisée en association avec les approches psychologiques.
  2. Si recours à la contention : négocier à l’avance si les parents doivent y participer.

Tenir compte de la capacité de l’enfant ou adolescent à consentir : il n’est pas approprié de contenir un enfant plus âgé de force s’il indique clairement qu’il n’est pas d’accord pour faire le soin.

La sédation peut être efficace dans les situations aiguës. Toutefois, le report ultérieur de la réalisation du soin reste essentiel.
Les parents ne doivent pas automatiquement être impliqués lorsqu’il y a une tentative de recours à la contention.
Bien que de nombreux parents se sentent confiants et capables, ils continuent cependant à vouloir des conseils.
Chaque fois que des contentions ont été utilisées, les jeunes enfants ont connu des niveaux encore plus élevés de détresse et potentiellement une perte de confiance.
Une autorisation préalable est obligatoire.
La formation des professionnels de pédiatrie à ces différentes stratégies est significative dans l’amélioration des soins.
Commentaire Pédiadol : un article très pratique, qui ouvre des perspectives : à lire et relire et diffuser !!

Quand « Ne t’inquiète pas » communique de la peur : perceptions des enfants sur les comportements de réassurance et de distraction des parents au cours d’un soin douloureux
McMurtry CM, Chambers CT, McGrath PJ, Asp E.
When « don’t worry » communicates fear: Children’s perceptions of parental reassurance and distraction during a painful medical procedure
Pain 2010 ; 150 (1) : 52-8

L’étude des effets de la présence des parents lors des soins douloureux de leur enfant a montré que les stratégies de réassurance, comme le fait de lui dire que tout ira bien, pouvaient être associées à une augmentation de l’inquiétude de l’enfant et à une aggravation des signes de détresse. À l’inverse, la distraction entraînait une augmentation des comportements adaptés de l’enfant lors de ce soin. Ces observations sur la réassurance, sans que nous sachions en expliquer les causes, vont à l’encontre de ce que l’on pourrait naturellement penser. Une des raisons pourrait être que lorsque le parent utilise des paroles rassurantes cela serait en fait pour masquer sa propre peur. C’est ainsi, qu’au-delà des paroles qui se voudraient rassurantes, le parent communiquerait sa peur à l’enfant par l’intermédiaire de différents canaux de communication comme l’expression de son visage, le ton de sa voix et le contenu de son message.
L’objectif de cette étude a donc été de valider cette hypothèse en examinant la perception de l’émotion parentale par l’enfant lorsque ce parent avait une attitude de réassurance ou une attitude de distraction au cours de la ponction veineuse de son enfant.
Pour cette recherche, 100 patients (40 garçons, 60 filles) âgés de 5 à 10 ans ont été recrutés au sein d’un centre pédiatrique alors qu’ils attendaient pour une ponction veineuse. Un des parents accompagnant l’enfant participait à cette recherche (86 mères, 14 pères).
Plusieurs échelles ont été utilisées : une afin de mesurer les comportements du parent et de l’enfant lors de la ponction veineuse (CAMPIS-R), et une mesurant l’intensité de l’émotion du parent : niveau de peur ou joie du parent attribué par l’enfant sur une échelle à 4 niveaux.
La procédure se déroulait en deux temps :

  • un premier temps où l’enfant a dû reconnaître, à partir de l’enregistrement vidéo du soin qu’il avait subi, si son parent était dans une attitude de réassurance ou dans une attitude de distraction. On demandait également à l’enfant s’il pensait que le parent était plutôt heureux ou effrayé, et l’intensité de cette émotion ;
  • un second temps dédié au visionnage de séquences vidéo créées artificiellement, où l’acteur jouant un parent pendant la ponction veineuse disait des paroles soit de réassurance avec information (« c’est fait, c’est presque fini »), soit de réassurance (« tout va bien, ça va bien aller »), soit de distraction (« regarde, regarde le poisson sur le mur »), en contrôlant trois variables : l’expression faciale, le ton de la voix (montant ou descendant) et le contenu verbal (12 vignettes) ; les enfants devaient alors aussi coter le niveau de peur ou de joie du parent.

 

Les résultats confirment seulement partiellement cette hypothèse que l’enfant percevrait son parent comme plus anxieux lorsqu’il tente de le rassurer plutôt que lorsqu’il essaie de le distraire. Les résultats ne sont pas significatifs, mais la tendance est effectivement que les enfants attribuent des niveaux de peur plus élevés (et des niveaux de joie plus bas) aux parents qui font de la réassurance comparés à ceux qui les distraient, dans les deux situations étudiées. Pour les trois variables comportementales testées, les résultats ne fournissent que des indications partielles. Comme attendu, l’expression faciale de peur était corrélée à une évaluation plus élevée du niveau de peur attribuée au parent, de même pour la joie. Aucune différence n’a été retrouvée sur le niveau de peur du parent selon que le contenu de son message était informatif ou non informatif. Il existe en revanche des influences réciproques entre le ton de la voix, l’expression du visage et le contenu de l’énoncé ; l’expression du visage semble avoir un impact plus important que le ton de la voix.
Les auteurs concluent qu’ils ont travaillé sur des variables proximales et que d’autres variables comme le contexte du soin, l’histoire de l’enfant et la façon dont on perçoit l’enfant influencent ces comportements de réassurance ou de distraction et doivent être prises en compte.

Commentaire Pédiadol : Cette étude confirme que les paroles de réassurance, même positives, peuvent donner à l’enfant l’idée que son parent a peur, mais d’autres études sont nécessaires pour le corroborer.

Épidémiologie et prise en charge des gestes douloureux chez les nouveau-nés en réanimation : étude EPIPPAIN
Carbajal R, Rousset A, Danan C et al.
Epidemiology and Treatment of Painful Procedures in Neonates in Intensive Care Units
JAMA 2008 ; 300 (1) : 60-70

Contexte : La compréhension de l’épidémiologie et de la prise en charge de la douleur des gestes est nécessaire pour développer de stratégies efficaces permettant d’améliorer la prise en charge de la douleur chez les nouveau-nés.
Objectif : Rapporter des données épidémiologiques sur la douleur néonatale, collectées dans une région géographiquement définie et fondées sur l’observation directe de nouveau-nés, au lit du patient.
Conception, cadre, patients : De septembre 2005 à janvier 2006, des données concernant l’ensemble des procédures douloureuses et stressantes et les traitements analgésiques correspondants ont été collectées prospectivement pendant les 14 premiers jours à partir de l’admission, sur une période de 6 semaines, chez 430 nouveau-nés admis dans des centres de réanimation de niveau 3 en Île-de-France (11,3 millions d’habitants) pour l’étude EPIPPAIN (Epidemiology of Procedural Pain in Neonates).

Critère d’évaluation principal :
Nombre de gestes considérés comme douloureux ou stressants par le personnel de santé et traitements analgésiques correspondants.
Résultats : La moyenne (déviation standard) d’âge gestationnel et de la durée du séjour en réanimation étaient respectivement de 33,0 (4,6) semaines et de 8,4 (4,6) jours calendaires. Les nouveau-nés ont subi 60 969 gestes en première tentative, dont 42 413 (69,6 %) étaient douloureux et 18 556 (30,4 %) stressants. 11 546 autres tentatives ont été effectuées lors des gestes dont 10 366 (89,8 %) gestes douloureux et 1 180 (10,2 %) gestes stressants. La médiane (extrêmes) par nouveau-né était de 115 (4-613) gestes pendant la durée de l’étude et de 16 (0-62) gestes par jour d’hospitalisation. Parmi ceux-ci, la médiane (extrêmes) était de 75 (3-364) gestes douloureux par nouveau-né pendant la durée de l’étude, et de 10 (0-51) gestes douloureux par jour d’hospitalisation. Sur les 42 413 gestes douloureux, 2,1 % ont été accompagnés d’un traitement pharmacologique seul, 18,2 % uniquement de moyens non pharmacologiques, 20,8 % d’un traitement pharmacologique, non pharmacologique ou les deux.
79,2 % ont été réalisés sans analgésie spécifique pour le geste, et 34,2 % ont été effectués alors que le nouveau-né recevait simultanément une analgésie et/ou sédation en intraveineux continu pour d’autres raisons. La prématurité, le type de procédure, la présence parentale, la chirurgie, la réalisation en journée et le jour de la procédure par rapport au premier jour d’admission étaient associés à une plus grande utilisation d’analgésie préventive spécifique. À l’inverse, la ventilation mécanique, la ventilation non invasive et l’administration simultanée d’une analgésie non spécifique étaient associées à une plus faible utilisation d’analgésie préventive spécifique.

Conclusion : Lors de soins de réanimation chez les nouveau-nés en Île-de-France, un grand nombre de gestes douloureux et stressants ont été réalisés, dont la majorité n’étaient pas accompagnés d’analgésie.


Moyens non pharmacologiques pour diminuer la douleur liée aux soins
Pediatric procedural pain
Young KD.
Ann Emerg Med 2005 ; 45 : 160-71
Très bonne synthèse sur la perception de la douleur liée aux soins chez l’enfant et les moyens non pharmacologiques pour la diminuer. L’accent est mis d’abord sur la mémorisation de la douleur et ses conséquences néfastes, puis sur les facteurs qui augmentent la douleur comme le jeune âge et l’anxiété mais aussi les facteurs de coping (moyens de faire face), les méthodes de préparation ou d’accompagnement du soin qui peuvent diminuer ou augmenter la douleur.
Ensuite un long développement très pratique et très étayé sur la façon de réaliser le soin et les méthodes non pharmacologiques qui permettent de diminuer la détresse et la douleur. D’après les études disponibles, il est conseillé aujourd’hui :

  • d’informer avant le soin (pas pendant),
  • de distraire pendant le soin,
  • alors que la réassurance pendant le soin : « ne t’inquiète pas » est inefficace auprès d’un enfant en détresse voire aggrave la détresse,
    d’impliquer l’enfant s’il le souhaite : ne pas contraindre, donner une tâche à faire (par exemple tenir un coton),
  • de permettre la présence et l’implication des parents.

 

Concernant les attitudes du personnel, il est recommandé ne pas parler entre eux, d’éviter les critiques comme les excuses. Quant aux conditions de l’environnement, éviter que l’enfant entende un autre enfant subir le même geste et éviter à l’enfant la vision d’objets inquiétants.
Nombreux conseils judicieux et algorithmes de décision.
Bref résumé sur l’anesthésie locale, rien sur la sédation médicamenteuse.
Bibliographie très complète (156 réf).