La distraction high-tech lors des soins

Shahid R, Benedict C, Mishra S et al.

Using iPads for Distraction to Reduce Pain During Immunizations
Clin Pediatr (Phila) 2015 ; 54 (2) : 145-8

Cette étude avec utilisation de tablette numérique concerne l’injection de vaccins chez des enfants de
2 à 5 ans dans un centre médical aux États-Unis, c’est une étude ouverte non randomisée (vaccins
non précisés). L’opinion des parents (échelle de Likert en 5 points) était demandée sur le niveau
de peur, la quantité de pleurs, le niveau de coopération, le degré de contention nécessaire, et
finalement le degré de douleur et de détresse, pour 57 enfants avant la mise en place des tablettes
numériques et 46 enfants après (les enfants regardaient une vidéo ou un jeu de leur choix). Toutes
les réponses des parents étaient en faveur de la tablette numérique.
Armengaud JB, Laffaille C, Arnaud C, et al.
Utilisation de l’iPad aux urgences lors de gestes douloureux
Réalités Pédiatriques 2013 ; 176 : 1-5

L’équipe des urgences de l’hôpital Trousseau à Paris utilise depuis 2012 une tablette numérique
pour distraire les enfants lors des soins. Sur les 47 380 passages annuels, il a été identifié
14 741 patients en situation de douleur, soit du fait de leur pathologie, soit du fait d’un geste de
soin. Une première tablette a été implantée, l’équipe soignante se l’est peu à peu appropriée, le
choix des programmes selon l’âge s’est précisé avec la collaboration des parents et des enfants, et
le support a été mis au point (pied orientable, prévention du vol ou de la dégradation). La tablette
est disponible dans les lieux stratégiques de soins : salle de sutures, de prélèvement. L’équipe a
peaufiné au fil des utilisations le choix des programmes et logiciels en fonction de l’âge de
l’enfant. Cette initiative a été récompensée par le prix innovations de l’AP-HP. L’article qui relate
cette expérience fait aussi la synthèse bibliographique des moyens non pharmacologiques, en
particulier la distraction, et plus précisément la distraction virtuelle, pour diminuer douleur et
détresse lors des gestes de soins.
Ha YO, Kim HS.
The effects of audiovisual distraction on children’s pain during laceration repair
Int J Nurs
Pract
2013 ; 19 Suppl 3 : 20-7

Cette étude avec utilisation de DVD, randomisée et contrôlée, avait pour but de déterminer les effets de la
distraction audiovisuelle sur la douleur des enfants pour les sutures aux urgences. 84 enfants âgés de 3 à 10 ans qui présentaient une plaie peu profonde < 5 cm ont été répartis
en 2 groupes : le groupe expérimental visionnait un DVD et le groupe contrôle sans, pendant la
suture. Les enfants des 2 groupes bénéficiaient d’une anesthésie locale et pouvaient bénéficier
d’une présence et une réassurance parentale. Les enfants ayant reçu des antalgiques ou des
sédatifs étaient exclus de l’étude. La douleur était évaluée par les enfants eux-mêmes avant et
après le soin par l’échelle des visages de Baker ; les parents grâce à une EVA de l’anxiété et de la
douleur, attribuée avant et après le geste ; deux chercheurs grâce à une échelle comportementale
(Procedure Behavior Check-list) lors de 4 étapes : 1) quand l’enfant s’allongeait sur le lit, 2) au
moment de l’anesthésie locale, 3) dans les 30 premières secondes de la suture, 4) après le geste.
A été également mesuré le taux de cortisol salivaire après le geste comme témoin de la réponse physiologique douloureuse.
La baisse des scores douloureux avant et après le geste était statistiquement plus importante dans
le groupe expérimental que dans le groupe contrôle. L’étude n’a pas montré de différences
statistiquement significatives dans les taux de cortisol entre les 2 groupes. Les auteurs concluent
que la distraction audiovisuelle pourrait être une méthode utile pour réduire la douleur des
enfants lors des sutures des enfants aux urgences.
McQueen A, Cress C, Tothy A.
Using a tablet computer during pediatric procedures : a case series and
review of the “apps”
Pediatr Emerg Care 2012 ; 28 : 712-4

Une équipe des urgences pédiatriques de Chicago a publié un article relatant 3 courts cas
cliniques d’enfants subissant des soins les yeux fixés sur la tablette numérique (suture avec injection d’anesthésie
locale) sans aucun signe de détresse (photos à l’appui) ; ils recommandent aussi une liste
d’applications (en anglais) et citent d’autres expériences aux urgences, en oncologie, en service de
brûlés.

Faber AW, Patterson DR, Bremer M.
Repeated Use of Immersive Virtual Reality Therapy to Control Pain
During Wound Dressing Changes in Pediatric and Adult Burn Patients
J Burn Care Res 2013 ; 34 (5) : 563-8

Une autre étude, hollandaise, est parue récemment, décrivant la réalisation chez 36 patients de 8 à 57 ans, de pansements quotidiens de brûlure (7 % de surface en moyenne [0,2-25 %]), avec
immersion dans un système de réalité virtuelle (1 à 7 pansement(s)/patient, précédé(s) par un
pansement sans cette technique de distraction). L’effet est net, la différence des scores de douleur
(EVA) est significative le 1er jour, et semble s’estomper ensuite (jusqu’à 7 pansements chez
quelques patients). Le logiciel (SnowWorld®) a été développé spécifiquement pour utilisation au
cours des soins médicaux.

Beran TN, Ramirez-Serrano A, Vanderkooi OG, et al.
Reducing children’s pain and distress towards flu
vaccinations: a novel and effective application of humanoid robotics
Vaccine 2013 ; 31 (25) : 2772-7

Au Canada, c’est un jouet robot qui a été testé pour diminuer la détresse et la douleur lors de la
vaccination antigrippale. Il s’agit d’un robot humanoïde (Aldebaran Robotics®) d’environ 1 m,
assis en face de l’enfant et lui parlant, rangeant des petits jouets dans une boîte sur la table devant
lui, et donnant des instructions en particulier celle de souffler sur un petit jouet décrit comme
sale, selon un programme défini. Dans le groupe contrôle, différents jouets étaient à disposition
de l’enfant sur la table devant lui. Les parents étaient toujours présents (enfant dans les bras ou
sur les genoux). L’étude randomisée a inclus 57 enfants de 4 à 9 ans. Les enfants (ainsi que le
parent, l’infirmière et le chercheur) donnaient leur score de douleur avec l’échelle des visages
FPS-R, les enfants étaient filmés et deux chercheurs cotaient le comportement avec un score de
détresse (BAADS : Behavioral Approach-Avoidance Distress Scale). Les scores de comportement
comme ceux de douleur étaient nettement plus bas dans le groupe robot (FPS-R 2,44 ± 3,52 vs 4,37
± 4,04, p = 0,04) ; les scores des observateurs étaient similaires, tous avec des différences
significatives ; si l’enfant rapportait une douleur forte lors d’une vaccination précédente, l’effet
était encore plus marqué. La plupart des enfants du groupe robot (85 %) voulaient être vaccinés
de nouveau avec lui (et les parents aussi)…

Sadeghi T, Mohammadi N, Shamshiri M, et al.
Effect of distraction on children’s pain during intravenous
catheter insertion
J Spec Pediatr Nurs 2013 ; 18 (2) : 109-14

À l’autre bout du monde, en Iran, c’est plus simplement l’action de presser une balle douce en
caoutchouc (non photographiée), qui a été testée lors d’une pose de perfusion (cathlon bleu 22 G).
Les enfants évaluaient leur douleur avec l’échelle de visages Wong Baker. La balle gonflable avait
un diamètre de 20 cm, les enfants devaient la presser d’une main en focalisant leur attention sur
ce geste. Aucune action n’était préconisée dans le groupe contrôle. 30 enfants de 4 à 6 ans ont
participé dans chaque groupe. Les scores moyens étaient de 3,43 ± 1,77 vs 5,26 ± 3,46 (p = 0,012).
Aucun enfant n’a décrit la douleur comme forte ou très forte dans le groupe distraction, contre 10
sur 30 dans le groupe contrôle. Les auteurs plaident pour cette méthode qui, de plus, dans leur
expérience, plait aux enfants.

Commentaire Pédiadol : La technologie au service de la distraction, c’est fascinant ! À suivre…
Cela ne doit pas nous faire oublier les moyens simples et non onéreux de distraction ou
d’hypnose (bulles de savon, livres ou objets animés…) ! Évidemment, crème anesthésiante ou
MEOPA ne sont pas utilisés en Iran, et le score de 3,43 sera jugé plus ou moins acceptable selon
les situations, les cultures, les pays… Enfin avant tout, la relation avec l’enfant et sa famille passe
en premier : établir un contact chaleureux, informer, distraire, c’est le B-A BA de l’antalgie des
soins.

Efficacité de 2 méthodes de distraction – jeux de cartes,
kaléidoscope – sur la douleur et l’anxiété des enfants lors des prélèvements veineux

Canbulat N, Inal S, Sönmezer H.
Efficacy of distraction methods on procedural pain and anxiety by applying
distraction cards and kaleidoscope in children
Asian Nurs Res (Korean
Soc Nurs Sci)
2014 ; 8 (1) : 23-8
Étude prospective, randomisée sur l’utilisation de distraction dans un
hôpital turc. Des enfants âgés de 7 à 11 ans, devant avoir un prélèvement veineux ont été
randomisés en 3 groupes. Le 1er groupe (G1) jouait avec des cartes colorées avec des formes et
dessins, le 2e groupe (G2) regardait dans un kaléidoscope, le 3e groupe n’avait aucune méthode de
distraction. L’évaluation de la douleur était réalisée avec l’échelle Wong-Baker-Faces (0-10) et
l’anxiété était mesurée avec la Children Fear Scale (0-4) avant et après le soin, par une infirmière
observatrice, l’enfant et les parents.
Résultats : 188 enfants inclus, G1 n = 63, G2 n = 62, G3 n = 63. La moyenne (DS) d’âge était de 8,8
(1,5) ans avec des valeurs extrêmes de 7 à 11 ans. 50 % étaient des filles. Les scores
moyens de douleur étaient significativement plus bas dans le G1 (p < 0,0005) comparés aux
G2 et G3. Ils étaient sur une échelle de 0 à 10 respectivement de : 2,41 (2,49) ; 3,10 (2,16) et
4,44 (3,64). Les scores du G2 étaient significativement plus bas que ceux du G3.
L’anxiété des enfants était de façon significative plus basse pour les enfants bénéficiant d’une
méthode de distraction (p < 0,001) : les scores moyens sur la CFS étaient respectivement de 1,10
(1,2) ; 1,61 (1,12) et 2,41 (1,3).
En conclusion, cette étude renforce les résultats connus dans la littérature sur le bénéfice de
l’utilisation de la distraction lors des soins douloureux chez les enfants. L’utilisation de cartes
colorées et distrayantes (et à un moindre degré d’un kaléidoscope) lors des prélèvements veineux
diminue de façon significative la douleur et l’anxiété.


Une abeille contre la douleur des piqûres !

Baxter AL, Cohen LL, McElvery HL, Lawson ML, et al.
An Integration of Vibration and Cold Relieves Venipuncture Pain in a Pediatric Emergency Department
Pediatr Emerg Care 2011 ; 27 (12) : 1151-6
Buzzy®, un système ludique associant froid, vibration et distraction, soulage la douleur liée aux ponctions veineuses aux urgences pédiatriques.

 

Buzzy®, commercialisé aux États-Unis, que l’on pose comme un garrot à proximité du point de piqûre, est un dispositif qui vibre, en forme d’abeille, avec interposition d’un patch glacé (les ailes bleues) ; il est complété par l’utilisation de distraction par de petites cartes ludiques.
Cette étude randomisée avait pour objectif de démonter l’efficacité du système Buzzy® comparée à une prise en charge classique sur la douleur liée aux ponctions veineuses.

Méthode : Tous les enfants âgés de 4 à 18 ans, admis aux urgences et devant subir une ponction veineuse avaient un patch de crème anesthésiante ou non en association à : soit un spray de froid, soit Buzzy®. L’anxiété était évaluée avec la CAPS (Children’ Anxiety and Pain Scale, score de 1 à 5) avant le geste. Pendant le geste, la douleur était évaluée par l’échelle des visages (enfants et parents) FPS-R. Toutes les ponctions ont été filmées et la détresse a été évaluée avec l’OSBD (Observational Scale of Behavioural Distress, score de 1 à 11) sur enregistrement vidéo par deux personnes indépendantes. Le taux de succès, l’utilisation de la distraction ont également été recueillies.
Résultats : 81 enfants ont été inclus, 41 dans le groupe Buzzy®, 40 dans le groupe contrôle. L’âge médian était de 10 ans [IC 95 % 8,91-10,89]. 50 % des enfants du groupe standard ont eu de la crème anesthésiante, 46,3 % dans le groupe Buzzy®. Les enfants du groupe Buzzy® avaient des scores de douleur significativement plus bas : 2 vs 4 sur la FPS-R enfant et parents.
Les enfants du groupe Buzzy® avaient 3 fois plus de chance d’avoir la prise de sang en une seule tentative [OR 3,05 ; IC 95 % 1,3-9,02].
Inal S, Kelleci M.
Relief of pain during blood specimen collection in pediatric patients
MCN Am J Matern
Child Nurs
2012 ; 37 (5) : 339-45

Dans cette étude, faite à Istanbul, 120 enfants de 6 à 12 ans étaient randomisés à recevoir soit
Buzzy® (appliqué juste avant et pendant la ponction veineuse), soit aucune méthode. La douleur
était mesurée par l’échelle de visages FPS-R, l’anxiété préprocédurale était aussi mesurée. Le
groupe bénéficiant de Buzzy avait des scores de douleur et d’anxiété significativement inférieurs
itsignificativement la douleur liée à la ponction veineuse sans altérer le taux de réussite. Une étude
avait déjà donné les mêmes résultats chez l’adulte (Clin J Pain 2009). Plus d’infos sur
www.buzzy4shots.com.

Commentaire Pédiadol : Ce dispositif amusant est une bonne alternative pour diminuer la
phobie des aiguilles chez les enfants ; il pourrait être validé pour d’autres effractions (IM,
ponction au doigt, etc.). L’étude pour les ponctions veineuses est critiquable du fait qu’un grand
nombre d’enfants avaient aussi de la crème anesthésiante : d’autres études seront bienvenues.

Souffler des bulles ou respirer profondément
diminue la douleur des ponctions veineuses

Bagheriyan S, Borhani F, Abbaszadeh A, et al.
The effects of regular breathing exercise and making
bubbles on the pain of catheter insertion in school age children
Iran J Nurs Midwifery Res 2011 ; 16 (2) : 174-
80
Cette équipe iranienne a cherché à évaluer l’effet antalgique comparé de souffler des bulles de
savon et de faire des exercices respiratoires au cours de la pose d’un cathéter veineux. Soixante
enfants de 6 à 12 ans (âge médian 9 ans dans les 3 groupes), suivis pour thalassémie, ont
participé à cette étude randomisée (randomisation avant chaque soin en jetant un dé). Ils étaient
répartis en trois groupes :

  • exercices respiratoires (les enfants devaient respirer profondément et expirer doucement
    en disant « hey », puis après une autre inspiration profonde, expirer en disant « hu »,
    ceci une minute avant et pendant la pose du cathéter, jusqu’à la fixation de celui-ci) ;
  • bulles de savon (les enfants soufflaient des bulles une minute avant et pendant la pose
    du cathéter, jusqu’à la fixation de celui-ci) ;
  • et contrôles (aucune technique antalgique, soin réalisé dans les conditions habituelles).

L’évaluation était faite par l’échelle numérique (EN) et par le score comportemental FLACC sur
10. Les différences étaient significatives tant pour l’auto-évaluation que l’hétéro-évaluation, en
faveur de la méthode de distraction, qu’il s’agisse de souffler des bulles de savon ou de faire des
exercices respiratoires ; la différence entre les deux méthodes n’était pas significative. Scores
moyens d’EN : 3,13 pour les contrôles, 1,75 pour les bulles, 1,42 pour les exercices respiratoires.
Scores moyens FLACC : 2,8 pour les contrôles, 1,13 pour les bulles, et 0,96 pour les exercices de
respiration. Les scores d’auto-évaluation par échelle numérique et d’hétéro-évaluation par la
FLACC étaient bien corrélés (r = 0,67). Les scores étaient inversement proportionnels à l’âge, mais
il n’y avait pas de différence selon le sexe.
En conclusion, ces deux méthodes de distraction, gratuites ou peu coûteuses, sont efficaces ;
remarquons cependant que les effectifs sont faibles, que l’étude ne pouvait pas être en aveugle, et que les scores même du groupe contrôle sont bas ; le rôle de la culture dans la douleur de la pose
de perfusion est sans doute aussi à évoquer.

Commentaire Pédiadol : Les bulles de savon plaisent aux enfants ; respirer profondément en
exhalant un son est simple à mettre en œuvre ! Ces deux méthodes sont efficaces pour réduire la
douleur d’une pose de cathéter veineux.

Distraction par les clowns et anxiété périopératoire

Fernandes SC, Arriaga P.
The effects of clown intervention on worries and emotional responses in children undergoing surgery
J Health Psychol 2010 ; 15 : 405-15

Cette étude réalisée au Portugal avait pour but de vérifier si l’intervention des clowns peut réduire les inquiétudes avant l’opération et les réactions affectives des enfants subissant une chirurgie mineure. L’anxiété des parents a aussi été fait l’objet de test. L’âge de l’enfant, une hospitalisation précédente, le tempérament de l’enfant (timidité, émotivité, activité, sociabilité) ont été utilisés comme prédicteurs des réactions de l’enfant dans la phase préopératoire. Soixante-dix enfants ont été affectés à l’un des deux groupes suivants : enfants accompagnés par leurs parents et deux clowns ou enfants accompagnés par leurs parents, sans les clowns. Les résultats font ressortir la pertinence de l’intervention des clowns sur la réduction des inquiétudes préopératoires et des réactions émotionnelles, non seulement chez les enfants mais aussi chez leurs parents.
Contexte : La tension, la nervosité et la peur sont des sentiments courants chez les enfants en période préopératoire. L’anxiété des enfants à l’induction de l’anesthésie est aussi associée à des comportements négatifs après l’opération : difficultés à s’alimenter, anxiété de séparation, troubles du sommeil. L’anxiété des parents est également fréquente lors de l’hospitalisation d’un enfant. En outre, il a déjà été montré que l’anxiété préopératoire des enfants est généralement associée à celle des parents.
Différentes méthodes ont été utilisées telles que la présence des parents à l’induction de l’anesthésie, les méthodes de distraction (musique, jeux vidéo, jouets). Les interventions de clowns se sont multipliées, partant de l’hypothèse que l’humour concourt au bien-être des patients. Mais s’il existait quelques études montrant la réduction de l’anxiété des parents et des enfants (notamment Vagnoli et al., 2005) grâce à l’intervention des clowns, la plupart ne concernaient pas les inquiétudes spécifiquement liées à l’opération.
Méthodes : Les critères d’inclusion étaient les suivants : enfant de 5 à 12 ans devant subir une chirurgie mineure en ambulatoire, accompagnés par un parent (père ou mère), avec consentement parental pour participer à l’étude.
L’échantillon final comprenait 70 enfants (dont 53 garçons). Les enfants ont été affectés soit au groupe Clowns (35 enfants, accompagnés par leurs parents et deux clowns), soit au groupe témoin (35 enfants, accompagnés par leurs parents, sans clowns).
Les outils de mesure étaient : le CSWQ (Child Surgery Worries Questionnaire) pour évaluer les inquiétudes des enfants vis-à-vis de l’opération ; le SAM (Self-Assessment Mannequin) pour mesurer les états émotionnels ; le STAI (State-Trait Inventory Form) pour évaluer l’anxiété préopératoire des parents) ; le EAS Temperament Survey for Children Parental Ratings pour mesurer les réactions émotionnelles, l’activité et la sociabilité de l’enfant. Enfin, un questionnaire à 4 items a été établi pour connaître l’opinion des soignants sur l’efficacité des clowns.
Les enfants étaient affectés au groupe Clowns ou au groupe témoin, selon le jour de l’intervention. Les groupes étaient planifiés des jours distincts, pour que les enfants du groupe témoin ne soient pas informés de la présence des clowns. Les clowns arrivaient en salle de prise en charge 30 minutes avant que l’enfant parte en salle d’opération et restaient 15 minutes avec l’enfant. Tours de magie, musique, blagues, jeux étaient les méthodes utilisées et adaptées à l’âge de l’enfant.
Résultats : Les enfants du groupe Clowns signalaient moins d’inquiétude que ceux du groupe témoin concernant l’hospitalisation, les gestes médicaux et la maladie. Ils rapportaient également un affect positif supérieur, une moindre excitation, et une réduction de l’excitation entre la phase préopératoire et la phase postopératoire.
L’anxiété des parents était plus faible dans le groupe Clowns.
La présence des clowns, le jeune âge de l’enfant et un fort degré de sociabilité étaient des prédicteurs significatifs d’un affect positif supérieur (39 % de la variance).
96,43 % des soignants étaient d’accord avec la présence des clowns. Ils les considéraient comme utiles pour les enfants (96,43 %), pour les parents (89,29 %) et pour eux-mêmes (64,29 %). La majorité (89,29 %) étaient favorables à la poursuite de cette intervention et déclinaient l’idée que les clowns soient une gêne (71,43 %).
Discussion : Ces résultats confirment l’hypothèse des auteurs, qui signalent une limite importante, à savoir la palette très large d’âge des enfants recrutés. En effet, bien qu’ils aient utilisé une aide visuelle (thermomètre) pour faciliter la compréhension, il n’est pas certain que tous les enfants aient compris l’échelle d’autoévaluation. L’absence de randomisation est également une limite, qui pourrait être contournée par un design différent (pré-test et post-test). D’autres prédicteurs pourraient aussi être évalués, par ex. la présence de troubles comportementaux, la santé mentale et le style de « coping » de l’enfant. Il pourrait aussi être intéressant d’examiner si l’intervention des clowns, en réduisant le stress de l’enfant, contribue à abaisser les coûts des soins.


Réalité virtuelle pour distraire l’enfant lors d’une pose de perfusion

Gold JI, Kim SH, Kant AJ, J et al.
Effectiveness
of Virtual Reality for Pediatric Pain Distraction during IV Placement
Cyberpsychol Behav 2006 ; 9 : 207-12
Objectif : Évaluer l’efficacité
et le bien-fondé de la réalité virtuelle (VR) pour distraire les enfants par
rapport à la douleur lors d’une pose de perfusion.
Méthode : 20 enfants (12 garçons,
8 filles ; moyenne d’âge = 10,2 ans ; service de radiologie) ayant besoin d’une
perfusion pour faire une IRM ont été randomisés en deux groupes. Le groupe 1
a eu la distraction par VR (film « Street Luge » visionné en 3D au moyen
d’un casque). Le groupe 2 a eu une prise en charge habituelle (crème anesthésiante)
sans distraction. Les enfants, les parents et les soignants ont rempli des questionnaires
sur la douleur et l’anxiété de l’enfant.
Résultats : Les scores sur l’échelle des visages
étaient 4 fois plus élevés dans le groupe contrôle. Des corrélations ont été
trouvées entre différentes mesures : anxiété anticipatoire, douleur dite « affective »,
niveau de douleur lors de la pose du cathéter, et niveaux de douleur liée aux
soins précédents, ce qui montre la complexité de la perception douloureuse.
Le système de réalité virtuelle « Street Luge » est efficace comme outil
de distraction, les enfants restent présents, ne se sentent pas nauséeux, et
enfants, parents et soignants expriment une satisfaction plus élevée que dans
le groupe contrôle. Cet outil a un fort potentiel pour diminuer la douleur et
l’anxiété de l’enfant lors de soins douloureux. Toutefois, une recherche plus
approfondie est nécessaire, avec des échantillons plus larges et dans d’autres
situations médicales, pour arriver à des conclusions plus fermes.

Gonfler un ballon diminue la douleur de la ponction veineuse

Gupta D, Agarwal A, Dhiraaj S, et al.
An
evaluation of efficacy of ballon inflation on venous cannulation pain in children :
a prospective, randomized, controlled study
Anesth Analg 2006 ; 102 (5) : 1372-5
Une équipe indienne a évalué l’efficacité
de « gonfler un ballon » pour diminuer la douleur liée à
une ponction veineuse. Cette étude prospective, avec groupe contrôle,
a inclus 75 enfants âgés de 6 à 12 ans randomisés
en 3 groupes de 25 :

  • groupe
    I : groupe contrôle ;
  • groupe
    II : groupe distraction : les enfants devaient presser une balle en caoutchouc
    avec la main du bras libre ;
  • groupe
    III : les enfants devaient souffler dans un ballon pendant 20 secondes. La
    pose du cathlon se faisait pendant l’expiration forcée.

Les enfants
des 3 groupes ont été piqués sur la face dorsale de la
main non dominante.
Une auto-évaluation de la douleur a été réalisée
avec l’EVA et l’échelle des visages. Tous les enfants ont reçu
une prémédication par du sirop de chlorydrate de prométazine
(sédatif antihistaminique H1 : Phénergan®) à la posologie
de 0,5 mg/kg 2 h avant le geste.
Les enfants étaient accompagnés de leur mère et leur niveau
d’anxiété à l’arrivée a été
évalué par la Yale preoperative anxiety scale (0 à 100).
Les scores d’anxiété et le profil démographique des
enfants étaient comparables pour les 3 groupes.
Les résultats montrent une incidence et des scores de
douleur significativement plus bas dans le groupe III (gonfler un ballon) :

EVA/groupes I
: contrôle
II
: distraction
III
: ballon
Absence
de douleur
N = 0/25 N = 0/25 N = 11/25
Présence
de douleur
N = 25/25 N =
25/25
N =
14/25
Faible
: 1 à 3
9/25
20/25
14/25
Modérée
: 4 à 6
16/25
5/25
0/25
Sévère
: 7 à 10
0/25
0/25
20/25
Commentaire Pédiadol : Cette étude confirme l’intérêt
de la distraction lors d’un soin douloureux de type effraction cutanée.
Gonfler un ballon est un geste simple facile à mettre en place
dans les services de pédiatrie. À vous de jouer ! Pédiadol
ne recommande pas de prémédication systématique dans
ce type de soin.

Distraction et suture

Sinha M, Christopher NC, Fenn R, et al.
Evaluation of nonpharmacologic methods of pain and anxiety
management for laceration repair in the pediatric emergency department
Pediatrics 2006 ; 118 (3) : 1321 ;
author reply 1321-2
Cette étude randomisée avec groupe contrôle avait pour objectif de mesurer la baisse de la
douleur et de l’anxiété par des techniques de distraction aux urgences chez 240 enfants âgés de 6
à 18 ans lors de sutures. L’intensité de la douleur était mesurée par une échelle de 7 visages et une
EVA, l’anxiété par une échelle d’anxiété adaptée pour l’enfant de plus de 10 ans. Les parents notaient leur évaluation de l’intensité de la douleur de leur enfant. Ces mesures ont été faites
avant et après la suture. Dans cette étude, il n’y a pas eu de différence significative dans l’intensité
de la douleur entre le groupe distraction et le groupe contrôle avant et après la suture chez les
enfants de moins de 10 ans. Pour les plus âgés, la distraction baissait les scores d’anxiété mais non
la douleur.

Commentaire Pédiadol : Cette étude rappelle que les techniques non pharmacologiques ne
doivent pas se substituer au traitement médicamenteux mais le compléter.

Comparaison de méthodes de distraction sur l’anxiété de l’enfant lors d’une ponction veineuse

MacLaren
JE, Cohen LL.

A comparison of distraction strategies for venipuncture distress in children
J Pediatr Psychol 2005 ; 30 (5) : 387-96
Objectif
:
Comparer l’efficacité de deux méthodes de distraction, une avec participation
active de l’enfant lors de la distraction et la seconde avec participation passive,
avec un groupe contrôle, sur la diminution de l’anxiété de l’enfant lors de
la ponction veineuse.
Méthode : 88 enfants de 1 à 7 ans devant avoir une ponction
veineuse ont été randomisés en 3 groupes :

  • Distraction
    à l’aide d’un jouet interactif (jouet adapté à l’âge : pour les plus
    jeunes robot avec boutons, pour les plus âgés ordinateur portable avec choix
    entre différents jeux)
  • Distraction
    « passive » : l’enfant choisit et regarde un dessin animé qu’il commente
    avec les soignants/parents
  • Groupe
    contrôle : déroulement habituel du soin mais les méthodes de distractions
    sont évitées

L’anxiété
a été évaluée par le parent, l’infirmière , par un observateur avec le score
OSBD modifié (enregistrement vidéo) et l’enfant lui-même (à partir de 4 ans)
avec une échelle de 5 visages.
Le fonctionnement de la distraction, les interactions avec l’enfant ont été
évalués avec une grille d’observation (enregistrement vidéo).
Résultats : les enfants du groupe distraction « passive »
étaient moins anxieux que les enfants du groupe distraction interactive et du groupe
contrôle, mais il n’y avait pas de différence entre les deux derniers groupes. Les
enfants qui ont eu le plus d’interactions avec l’entourage ont eu les scores
d’anxiété les plus bas. Les enfants ayant eu une distraction interactive étaient
plus distraits que le groupe contrôle.
Conclusion : Bien que la littérature suggère la supériorité
de la distraction interactive sur la distraction passive, les résultats de cette
étude mettent en évidence que la distraction passive est plus efficace lors
de la réalisation d’une ponction veineuse chez l’enfant. Il est possible que
l’anxiété de l’enfant interfère avec la capacité de distraction de la personne
qui fait le soin.

Commentaire Pédiadol : Ce qui fonctionne le mieux pour diminuer
l’anxiété de l’enfant est d’arriver à focaliser son attention. Statistiquement,
regarder un dessin animé a été plus efficace que « jouer » dans
cette étude. Il est dommage que la douleur n’ait pas été évaluée.

La présence des clowns en salle d’opération : un traitement efficace contre l’anxiété des enfants

Vagnoli L, Caprrilli S, Robiglio A, et al.
Clown
doctors as a treatment for preoperative anxiety in children: a randomized,
prospective study
Pediatrics 2005 ; 116 :
563-7
Étude italienne
randomisée prospective dont l’objectif était d’étudier l’effet de la présence
des clowns sur l’anxiété des enfants durant l’induction d’anesthésie en présence
des parents. 40 enfants âgés de 5 à 12 ans devant avoir une chirurgie mineure
en hôpital de jour ont été répartis en 2 groupes de 20 :

  • un groupe « clowns » :
    chaque enfant était accompagné à la fois par les clowns et par le parent de son
    choix ;
  • et un groupe « contrôle » où chaque enfant était accompagné par
    le parent de son choix.

L’anxiété des enfants en préopératoire était mesurée en
salle d’attente et au bloc par le Modified Yale Préoperative Anxiety (échelle
d’hétero-évaluation) traduit en italien. L’anxiété des parents a été auto-évaluée
par le State-trait Anxiety Inventory traduit. Les soignants ont répondu à un
questionnaire de 4 questions évaluant leur avis sur le bénéfice de la présence
des clowns sur l’anxiété des enfants et l’effet de la présence des clowns sur
leur travail.
Il existait une baisse du score moyen d’anxiété d’environ 50 % (68 versus 36/100) chez les enfants du groupe « clown » par rapport au groupe contrôle
en salle d’opération, Dans ce groupe, le score d’anxiété augmente non significativement
(31 versus 38) à l’entrée en salle d’opération. En revanche, dans le
groupe « contrôle », on observait une augmentation de l’anxiété des enfants
de 50 % (36 versus 68) en salle d’opération par rapport à la salle
d’attente.
Les clowns étaient perçus comme bénéfiques pour les enfants en préopératoire mais
la majorité des soignants se sont opposés à poursuivre ce programme car ils le
percevaient comme une gêne au bon déroulement des soins en salle d’opération.
Les auteurs encouragent la promotion de cette forme de distraction pour les
enfants en préopératoire mais la résistance du personnel rend l’intégration
de ce programme difficile en salle d’opération.