Élisabeth Fournier-Charrière
Unité Douleur, Hôpital Bicêtre

 

Être parent d’adolescent douloureux chronique est difficile. Les réactions peuvent osciller entre :

  • la compassion, l’identification complète avec un encouragement aux plaintes, une catastrophisation, des pensées négatives sur l’avenir ;
  • la négligence, un déni, un rejet ;
  • une attitude « médiane » d’empathie avec encouragement aux activités de distraction et à la vie le plus normale possible et des pensées positives sur l’avenir.

L’équipe de Lynn Walker aux USA a cherché à mesurer l’impact de ces réactions en faisant subir un test de douleur expérimentale (crise de douleur abdominale déclenchée par une absorption massive d’eau « jusqu’à ce que tu te sentes plein ») chez des enfants de 8 à 16 ans souffrant de douleurs abdominales récurrentes (n = 110) et des contrôles sains (n = 120). L’objectif était d’évaluer l’impact du comportement parental sur les plaintes. Les parents ont été formés à l’aide de vidéos et de tests à avoir soit une attitude attentive (cibler l’attention de l’enfant sur les symptômes et sur son corps), soit une attitude de distraction (faire en sorte que l’enfant se concentre sur quelque chose d’autre), soit une attitude neutre (rien n’était demandé).
Dans le groupe « attention », il y avait de manière significative beaucoup plus de plaintes que dans le groupe « distraction », en particulier chez les enfants malades, et en particulier chez les filles. Les patients malades se plaignaient plus que les enfants sains. L’effet de la distraction était très positif pour les enfants sains, un peu moins pour les enfants malades. Les plaintes douloureuses ont pratiquement doublé lorsque les parents étaient attentifs, et étaient réduites de moitié lors de la distraction. Les enfants malades ainsi que les enfants sains trouvaient que la distraction les aidait à se sentir beaucoup mieux qu’une attitude attentive. Ceci devrait nous conduire à encourager les parents à utiliser des techniques de distraction.

La même équipe a conduit une enquête auprès des mères de 145 enfants souffrant de douleurs abdominales chroniques (8-18 ans) pour identifier leurs réactions (avec le questionnaire Adult Responses to Children’s Symptoms). Trois modes de réaction étaient distingués : protection (attention soignante, rôle passif de l’enfant « objet de soins ») ; critiques du comportement de douleur (minimisation du problème) ; encouragement et surveillance (entraîne l’enfant vers ses activités tout en surveillant les symptômes).


Walker LS, Williams SE, Smith CA, Garber J, Van Slyke DA, Lipani TA.
[Attention parentale versus distraction : impact sur les plaintes chez des enfants ayant ou non une pathologie abdominale douloureuse chronique]
Parent attention versus distraction: impact on symptom complaints by children with or without chronic functional abdominal pain
Pain 2006: 122; 43-52

Van Slyke DA, Walker LS.
[Réponses des mères à la douleur de l’enfant]
Mothers’ responses to children’s pain
Clin J Pain 2006; 22: 387-91