OBJECTIF
Définir les modalités d’administration du MEOPA afin de diminuer la douleur et l’anxiété liée aux soins.
DOMAINE D’APPLICATION
Le MEOPA est administré sur prescription médicale par des soignants (paramédicaux et médicaux) spécifiquement formés à l’administration du MEOPA.
L’administration de MEOPA n’entraîne pas d’anesthésie générale. Les contraintes de l’anesthésie générale ne sont donc pas applicables à l’administration du MEOPA : consultation d’anesthésie, jeûne, monitoring, salle de réveil.
DÉFINITIONS
MEOPA (Mélange équimolaire oxygène protoxyde d’azote) : gaz incolore, inodore composé d’un mélange d’oxygène 50 % et de protoxyde d’azote 50 % agissant par inhalation. Ce mélange est anxiolytique et procure une analgésie de surface.
RESPONSABILITÉS
- Personnel médical (médecins, sages-femmes, etc.)
- Personnel paramédical : infirmier(e)s, infirmier(e)s spécialisé(e)s, masseurs kinésithérapeutes, techniciens en imagerie médicale, spécifiquement formés à la méthode
PRÉSENTATION DU MATÉRIEL
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- Gaz pour inhalation en bouteille : obus blanc avec ligne bleue (attention au risque de confusion avec un obus d’oxygène)
- Bouteille de 1 m3
- Bouteille de 3 m3
- Kit d’inhalation avec tuyau évacuateur
- Kit d’inhalation pour 15 utilisations avec filtre à usage unique (Intersurgical®) ou matériel à usage unique (VBM®).
Composition qualitative et quantitative
- Protoxyde d’azote : 50 % (mole/mole)
- Oxygène : 50 % (mole/mole)
INDICATIONS
Mise en garde : Pour certains gestes le MEOPA est recommandé mais insuffisant et doit être associé à d’autres moyens antalgiques. Pour tous les soins, un effet antalgique insuffisant peut conduire à :
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- Tout soin source de douleur.
- Analgésie des actes douloureux de courte durée chez l’adulte et l’enfant, notamment ponction veineuse, ponction lombaire, myélogramme, petite chirurgie superficielle, sutures, pansements de petites brûlures, sondages, etc.
- Soins dentaires, chez les enfants, les patients anxieux ou handicapés.
- Analgésie lors de l’aide médicale d’urgence : traumatologie, brûlés, transport de patients douloureux, etc.
- Certaines douleurs médicales dans des conditions particulières : par exemple des crises drépanocytaires aiguës en attente de soulagement ou très douloureuses, certaines crises de migraines lors de la prise en charge initiale en service d’urgence, etc.
- En obstétrique, dans l’attente d’une analgésie péridurale, ou en cas de refus ou d’impossibilité de la réaliser.
CONTRE-INDICATIONS
Contre-indications absolues
- Patients nécessitant une ventilation en oxygène pur
- Hypertension intracrânienne
- Toute altération (aiguë) de l’état de conscience, empêchant la coopération du patient (en revanche les enfants ayant des troubles cognitifs établis ou les enfants polyhandicapés peuvent bénéficier du MEOPA)
- Traumatisme crânien non évalué
- Anomalies neurologiques d’apparition récente et non expliquées
- Pneumothorax
- Bulles d’emphysème
- Embolie gazeuse
- Accident de plongée
- Distension gazeuse abdominale, occlusion
- Situation vitale précaire
- Patient ayant reçu récemment un gaz ophtalmique (SF6, C3F8, C2F6) utilisé dans la chirurgie oculaire tant que persiste une bulle de gaz à l’intérieur de l’œil et au minimum pendant une période de 3 mois. Des complications postopératoires graves peuvent survenir en rapport avec l’augmentation de la pression intraoculaire
- Déficit connu et non substitué en vitamine B12
Contre-indications relatives
- Phobie du masque/refus de l’enfant
- Intensité douloureuse trop élevée
- Durée de l’acte, du soin trop longue
ATTENTION
L’utilisation de MEOPA seul ou avec un antalgique mineur (paracétamol, ibuprofène) n’est pas indiquée pour réduire une fracture ou une luxation, ces actes étant beaucoup trop douloureux. Dans ces situations une anesthésie générale ou locorégionale ou une autre sédation doit être réalisée.
PRÉCAUTIONS PARTICULIÈRES D’EMPLOI
- L’administration doit être faite dans des locaux aérés équipés d’une source d’oxygène et d’un chariot d’urgence à proximité.
- Le mélange doit être stocké et administré à une température supérieure à 0°C.
- Chez les enfants prenant des médicaments dépresseurs du système nerveux central, principalement les morphiniques et les benzodiazépines, le risque de somnolence est accru ; une évaluation par un médecin familier de la méthode est nécessaire.
- Chez l’enfant de moins de 3 ans il est plus difficile de réaliser une auto-administration. De plus l’effet du MEOPA est moins intense (concentration alvéolaire minimum efficace inférieure dans cette tranche d’âge). Le taux de succès est donc plus faible. En revanche, le MEOPA peut être proposé à tout âge y compris en période néonatale nécessitant toutefois la formation du personnel et un matériel adapté (masque taille 0 ou 1, valve, ballon 1 L).
- La garantie du succès de l’analgésie par inhalation du MEOPA est en grande partie liée à la qualité de l’accompagnement relationnel proposé à l’enfant : utilisation de la distraction, respect de son rythme, etc.
Situation particulière : dans les douleurs chroniques ou récurrentes une administration répétée et/ou prolongée de MEOPA peut entraîner un état de « mieux-être » pouvant conduire à une demande d’utilisation abusive. L’équipe soignante devra envisager de limiter les durées en fonction de la situation, en restant bienveillante.
EFFETS CLINIQUES
Certains effets peuvent survenir au cours de l’administration et disparaissent dans les minutes qui suivent l’inhalation du mélange :
- Effets associés : euphorie, rêves, paresthésies, modification des perceptions sensorielles (auditives, visuelles).
- Effets indésirables : approfondissement de la sédation, sensations vertigineuses, nausées, vomissements, angoisse, agitation.
DÉROULEMENT DU SOIN
Le jeûne n’est pas nécessaire .
Avant le geste douloureux
- Vérifier le matériel et le contenu de la bouteille
- Vérifier qu’il reste assez de MEOPA dans la bouteille (≥ 30 bar)
NB : Il est possible de faire respirer l’enfant dans un petit masque (taille 1) en appliquant celui-ci sur le nez si le soin à réaliser se situe au niveau de la bouche ou de faire inhaler l’enfant uniquement par la bouche à l’aide d’un embout buccal spécifique si le soin à réaliser se situe au niveau du nez.
Expliquer le soin
Le MEOPA et le déroulement du geste douloureux doivent être expliqués à l’enfant, à distance du geste, en dehors de la salle d’examen et si possible en présence des parents (utiliser la fiche spécifique d’information et le poster réalisés par l’association SPARADRAP) :
- Décrire précisément avec des mots simples les différentes phases de l’acte, du soin.
- Prévenir des différentes sensations ressenties quelquefois sous MEOPA sans minimiser ou amplifier les effets du MEOPA (ex : tu ne dormiras pas mais tu auras moins peur et moins mal, tu peux te sentir bizarre, tu peux sentir des picotements…).
- Laisser le temps aux enfants et aux parents de poser des questions, faire reformuler.
Mettre l’enfant en confiance
- Privilégier une approche progressive de l’enfant, lui expliquer le rôle qu’il peut jouer.
- Avec les petits, tout faire pour éviter les pleurs et l’agitation (le gaz n’est pas suffisamment puissant pour calmer un enfant très anxieux) : il ne faut surtout pas attendre plusieurs tentatives infructueuses avant de proposer le MEOPA car l’anxiété sera alors massive et le MEOPA insuffisamment puissant.
- Démarrer l’administration du MEOPA sur l’enfant assis ou dans les bras de ses parents.
- Pour les enfants très anxieux ou phobiques, être extrêmement progressif, rassurant, laisser des choix.
- Présenter le matériel en utilisant une approche ludique (manipulation du masque, du matériel…).
- Utiliser le jeu pour amener l’enfant à accepter le masque.
- Faire appel à l’équipe « Douleur » si besoin.
Pendant l’administration du MEOPA
Améliorer l’environnement
- Dédier une personne à l’administration du MEOPA tandis que quelqu’un d’autre réalise le soin.
- Veiller au calme dans lequel se déroule l’inhalation ; une amplification des bruits, des stimuli de tous ordres sont générateurs de stress et d’angoisse majeure chez l’enfant sous MEOPA et provoque un échec de la méthode.
- Solliciter les parents, définir à l’avance le rôle de chacun. Leur présence est souvent une aide précieuse pour limiter la détresse des plus petits.
Faire participer
- Toujours : encourager l’auto-administration, l’enfant doit participer le plus possible.
- Ne jamais appliquer le masque de force, pour les petits qui refusent le masque, pratiquer une contention souple (le masque sur le visage suit les mouvements de la tête sans bloquer le corps de l’enfant) pendant 1 à 2 minutes. Si les pleurs et l’agitation persistent au bout de 3 minutes, arrêter l’inhalation (le gaz n’est pas assez puissant pour contrôler la peur de l’enfant) et solliciter un moyen antalgique plus efficace.
Renforcer l’effet antalgique
- Favoriser le rôle actif de l’enfant et respecter ses choix : position, présence des parents, moment, etc.
- En cas d’effraction cutanée, associer la crème anesthésiante et/ou les anesthésiques locaux : spray, infiltration, gel de Xylocaïne®).
- Inciter l’enfant à se détendre en lui proposant de respirer calmement.
- Distraire, fixer l’attention de l’enfant sur un jouet, une histoire, une chanson, etc.
- Proposer des méthodes de relaxation et/ou d’hypnoanalgésie.
Réaliser l’acte douloureux
- Faire respirer le gaz pendant 3 minutes masque parfaitement étanche sur le visage avant de commencer le geste. Recommencer les 3 minutes si l’enfant retire le masque. Ne jamais appliquer le masque de force.
- Vérifier que le ballon ne soit jamais collabé ni distendu, son oscillation est le reflet de la ventilation. L’efficacité du MEOPA n’est pas liée au débit de gaz : un débit 4 L/min est aussi efficace que 12 L/min car le patient inhale toujours 50 % de protoxyde d’azote : le débit de gaz doit être adapté à la respiration pour que le ballon reste en permanence bien gonflé. Il n’y a pas de débit maximum.
- La personne qui aide à l’administration du MEOPA donne le signal du début du geste.
- Poursuivre l’inhalation pendant toute la durée de l’acte.
- Communiquer avec l’enfant sous MEOPA : l’inciter à exprimer ses craintes ou ses sensations « bizarres », l’informer du déroulement du geste par métaphore tout en le rassurant et en l’encourageant à bien respirer.
- Arrêter l’administration dès que le geste est terminé, pansement compris, fermer le débitlitre puis la bouteille.
Après l’arrêt de l’administration
- Dès le retrait du masque l’effet se dissipe, l’enfant retrouve son état initial en quelques minutes.
- Évaluer la satisfaction de l’enfant : l’inciter à exprimer ce qu’il a ressenti, expliquer et éventuellement rassurer.
- L’enfant peut manger normalement, sortir de l’hôpital ou reprendre ses activités.
- Pour le kit Intersurgical®, nettoyer le matériel après chaque usage.
En cas d’inefficacité du MEOPA
La sécurité du MEOPA est plus grande quand il est utilisé seul sans association médicamenteuse mais si le MEOPA seul est inefficace, il faut recourir à des associations médicamenteuses. Il s’agit alors d’une sédation plus profonde qui nécessite l’expertise d’un médecin sachant reconnaître et traiter les éventuels effets indésirables.
SURVEILLANCE
Surveillance essentiellement clinique
- Surveillance clinique continue de l’état du patient.
- La mesure de la saturation (SaO2) n’est nécessaire que pour les enfants fragiles, polymédicamentés.
- Garder un contact verbal permet de repérer la survenue d’une sédation excessive qui, si elle apparaît, se dissipe au retrait du masque.
- Noter dans le dossier de soins la survenue d’événements particuliers.
Une évaluation de la douleur provoquée par le soin est réalisée au terme de celui-ci à l’aide d’un outil adapté à l’âge. Cette information est consignée dans le dossier de soin.
Exposition du personnel soignant
En cas d’administrations prolongées dans un lieu fixe, un système d’évacuation des gaz doit être mis en place. A défaut, une aération régulière des locaux et l’utilisation d’une bouteille mobile permettant des administrations au lit du patient ou dans des locaux différents représentent deux mesures simples qui permettent de contrôler les problèmes liés à l’exposition professionnelle au protoxyde d’azote. Moyennant ces précautions, il n’a pas été observé d’effet notable pour le personnel soignant en lien avec l’utilisation intermittente occasionnelle du MEOPA.
MEOPA et grossesse
Le MEOPA n’a pas d’action tératogène chez l’homme ; il n’y a pas de risque pour les soignantes enceintes à l’utiliser.
DOCUMENTS ASSOCIÉS
- Protocole d’utilisation de la crème anesthésiante
- Modalités d’utilisation des solutions sucrées à visée antalgique chez le nourrisson de moins de 4 mois
- Prise en charge d’un patient sous PCA
- Prise en charge de la douleur d’une crise drépanocytaire sévère en urgence
RÉFÉRENCES
- Vidéo de formation à l’utilisation du MEOPA.
- Afssaps. Recommandations de bonne pratique 2009 : Prise en charge médicamenteuse de la douleur aiguë et chronique chez l’enfant.
- Circulaire N°DHOS/E2/2002/266 du 30 avril 2002, relative à la mise en œuvre du programme national de lutte contre la douleur 2002-2005 dans les établissements de santé.
- Décret n°2004-802 du 29 juillet 2004 relatif aux parties IV et V du code de la santé publique – Livre III – Titre I : profession d’infirmier ou d’infirmière ; article R. 4311-2, alinéa n°5 « De participer à la prévention, à l’évaluation et au soulagement de la douleur et de la détresse physique et psychique des personnes, particulièrement en fin de vie au moyen des soins palliatifs, et d’accompagner, en tant que de besoin, leur entourage. »
- Code de déontologie médicale abrogé par décret 2004-802 2004-07-29 art. 5 A JORF 8 août 2004.
- Décret professionnel technicien en radiologie référence Titre V du code de la santé publique : article L4351-1.
- Décret professionnel kinésithérapie décret n°96-879 du 8 octobre 1996 relatif aux actes professionnels et à l’exercice de la profession de masseur-kinésithérapeute.
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