Rapport sur l’hypnose demandé par la DGS
(Direction générale de la santé),
réalisé par une équipe de l’Inserm (Pr B. Falissard),
paru en 2015

L’hypnose médicale est une pratique thérapeutique dont la réputation augmente dans les pays développés. Elle doit être bien distinguée d’autres formes d’hypnose comme l’hypnose de spectacle, qui amuse ou inquiète, également de l’hypnose avec emprise, susceptible des pires dérives, ou encore des transes chamaniques traditionnelles dans certains pays. Elle fait figure de recours soit quand les traitements validés et recommandés de la médecine moderne dite scientifique échouent ou font défaut, soit en complément de celles-ci.
Avant de la recommander, il était donc nécessaire de rechercher les preuves de son efficacité et de son innocuité.
La sélection des auteurs a été très stricte, n’incluant que les domaines où des méta-analyses de la collaboration Cochrane étaient disponibles et consacrées à ce domaine de façon exclusive, ou des essais cliniques randomisés incluant au moins 100 patients. Dans ces conditions, la validité scientifique d’efficacité n’a pu être étudiée que pour :

  • la douleur et l’anxiété au cours de gestes chirurgicaux brefs et de gestes radiologiques ;
  • la douleur pendant le travail et l’accouchement ;
  • la prévention de la dépression du post-partum ;
  • les bouffées de chaleur de la ménopause ;
  • la réalisation des soins dentaires chez les enfants ;
  • la prise en charge de la schizophrénie ;
  • le traitement de l’intestin irritable ;
  • le sevrage tabagique.

Ainsi 6 revues Cochrane et 16 essais cliniques randomisés ont été analysés. On peut affirmer aujourd’hui que l’hypnose est efficace ou probablement efficace :

  • pour diminuer la consommation d’analgésiques ou de sédatifs au cours de gestes brefs de chirurgie (biopsie mammaire, IVG, soins dentaires, etc.) ou de radiologie interventionnelle (domaine où les résultats sont les plus sûrs) ;
  • pour diminuer les symptômes de l’intestin irritable (colopathie fonctionnelle) et de la dyspepsie ;
  • pour réduire les bouffées de chaleur de la ménopause.

Les nombreuses autres utilisations de l’hypnose médicale, pour lesquelles les études disponibles même de bonne qualité, sont de faible effectif, ne sont donc pas analysées dans ce rapport, en particulier l’hypnoanalgésie pour les soins algogènes et anxiogènes chez l’enfant.
Au terme de ces études, il semble difficile de dissocier les effets spécifiques des effets non spécifiques de l’hypnose. En effet, la mise en œuvre nécessaire des techniques d’aveugle est difficile à obtenir, et il n’est pas certain qu’aucun dispositif expérimental ne puisse jamais prendre en compte de manière complète les effets non spécifiques de la méthode. Ces effets (placebo, nocebo, suggestions, etc.) sont liés aux attentes des patients, aux croyances des praticiens réalisant les soins, au contexte sociologique ainsi qu’à d’autres effets mal connus relevant de l’interaction soignant-patient. Les limites tiennent aussi à la sélection des patients dont les attentes sont probablement fortes vis-à-vis de l’hypnose, ainsi qu’au positionnement des investigateurs vis-à-vis des techniques évaluées.
La sécurité de l’hypnose est bonne (aucun effet indésirable), à la condition qu’elle soit exercée par des thérapeutes possédant par ailleurs un diplôme de soignant de type diplôme d’État, et dans le cadre d’une éthique rigoureuse et exigeante, au mieux caractérisée par l’adhésion à une charte éthique.


Commentaire Pédiadol :
L’hypnoanalgésie pour les soins anxiogènes et douloureux chez l’enfant, méthode de soin largement employée en pédiatrie, n’a pas été analysée dans ce rapport, faute d’études d’effectifs et de qualité suffisantes. En effet, la méta-analyse récente de la Cochrane Collaboration (Uman LS et al. Psychological interventions for needle-related procedural pain and distress in children and adolescents. Cochrane Database Syst Rev. 2013 ; 10 : CD005179) a retrouvé 7 essais cliniques sur l’hypnose, incluant chacun entre 30 et 60 enfants pour un total d’environ 200 enfants inclus ; les auteurs ont conclu qu’il existe globalement des preuves solides de l’efficacité de la distraction et de l’hypnose pour la douleur et la détresse liée aux injections chez les enfants et les adolescents, avec un effect size plus important avec l’hypnose. Pour la douleur chronique, l’hypnose est efficace chez l’enfant souffrant de douleurs abdominales fonctionnelles dans deux études de petit effectif.
À l’évidence, de nouveaux essais, à la fois rigoureux et créatifs, sont donc indispensables.
Il est recommandé que le professionnel de santé (infirmier, médecin, psychologue, dentiste, etc.) formé à l’hypnose, ne considère l’hypnose que comme une thérapeutique complémentaire, en limitant son usage aux limites de compétences réglementées dans sa profession ; l’aspect scientifique et éthique de la pratique doit toujours être mis en avant, pour exclure des interprétations simplistes en particulier auprès du public et des médias.