EVALUATION: FOIRE AUX QUESTIONS

1/ Faut-il toujours croire l’évaluation
de l’enfant ?

Oui.
Néanmoins, l’évaluateur est attentif à mettre en relation l’évaluation
et le comportement.
Soit le chiffre donné par l’enfant et l’altération du comportement concordent,
cela valide le niveau de douleur et la prescription en découle.
Soit il existe des discordances entre le score de douleur
donné par l’enfant et son comportement, dans cette circonstance on rencontre
trois cas de figure :

    1. La
      « sur-cotation »

      L’enfant donne un chiffre élevé (par exemple score
      EVA à 7/10) alors qu’il joue et sourit quasi normalement.

      • Redonner
        les consignes recommandées pour l’échelle d’évaluation plus
        clairement.
      • Proposer
        un autre moyen d’auto-évaluation qui permettra de croiser les
        réponses.
        Si la discordance persiste,
      • évoquer
        cette discordance avec l’enfant sans remettre en question sa
        parole, (« je suis étonnée que… »)
      • demander
        à l’enfant si ce chiffre correspond en fait pour lui à autre
        chose qu’à de la douleur.

      En cas de douleur
      aiguë, on évoque le rôle de l’anxiété, de la peur de rentrer à la
      maison, de la peur de la baisse des antalgiques pour expliquer une
      « surcotation ». En pratique, il est préférable de
      ne pas augmenter le traitement et de chercher l’accord de l’enfant
      pour le diminuer. La discussion et la relation de confiance jouent
      un rôle indispensable dans ces situations.
      En cas de douleurs chroniques et en particulier de douleurs chroniques
      inexpliquées (de type psychogène), il est clair que le score d’évaluation
      élevé signe autre chose que la douleur. Dans ces circonstances,
      des réponses psychothérapeutiques ou comportementales ou sociales
      doivent être systématiquement envisagées.

    2. La « sous-cotation »
      L’enfant donne
      une évaluation modérée alors qu’il ne bouge pas dans son lit et
      qu’il présente des signes évidents de douleur (par exemple : atonie,
      crispation du visage, position antalgique…).

      • signifier
        à l’enfant qu’à nos yeux, il semble douloureux : « quand je
        te regarde, je vois que tu ne vas pas bien, j’ai l’impression
        que tu as mal, tes infirmières sont d’accord avec moi. Qu’est-ce
        que tu en penses ? »
        .
      • lui expliquer
        que nous avons besoin de sa collaboration pour suivre et adapter
        le traitement le mieux possible.

Certains enfants
veulent « faire plaisir » et donnent des chiffres bas, d’autres ont
perdu la notion de l’absence de douleur et se sous-cotent systématiquement.

  1. Le
    refus de cotation

    Ne faut pas
    oublier qu’un enfant douloureux peut devenir « grincheux », refusant
    la relation
    et donc de participer à la cotation.
    Il est tout à fait légitime de donner un antalgique
    adapté pour tester la réponse de l’enfant, qui
    lorsqu’il est soulagé redevient « normal »
    et interagit à nouveau de manière habituelle avec
    son entourage.

    Cliquer
    ici pour voir un exemple en vidéo

    (Extrait du CD-Rom La douleur de l’enfant –
    La reconnaître, l’évaluer, la traiter. Diffusion :
    www.sparadrap.org)
 

 


2/ La réglette d’évaluation (EVA ou visage) suffit-elle à évaluer un enfant
?

L’entrée en relation est
un préambule indispensable à toute évaluation de la douleur. Il est
recommandé de s’asseoir, de discuter un moment, de jouer avec l’enfant
tout en observant ses réactions et sa motricité pendant cette phase
de « diagnostic ». L’outil d’auto-évaluation est toujours proposé après
une phase d’observation et d’entretien avec l’enfant et sa famille.

 



3/ Certains petits enfants ne comprennent
pas pourquoi on les interroge sur leur douleur.

Il est nécessaire d’expliquer l’évaluation à l’enfant. On peut leur dire par exemple, qu’ils ne sont pas « transparents », que nous ne pouvons pas deviner ce qu’ils ressentent (entre 2 et 5 ans ils le croient souvent), d’où la nécessité de lui poser ces questions. Nous avons donc besoin qu’ils nous disent ce qu’ils ressentent (« toi seul sais ce que tu éprouves »).

 



4/
« Je n’ai pas besoin d’une grille d’évaluation pour savoir qu’un enfant est
douloureux ; j’ai de l’expérience. »

Votre expérience
vous permet de reconnaître les signes de la douleur et donc de vous
faire votre propre opinion sur le niveau de douleur de l’enfant mais
l’utilisation du score d’évaluation a plusieurs intérêts :

  1. elle permet
    la traçabilité des observations de l’infirmère ;
  2. elle permet
    d’objectiver les signes observés (au sens de sortir du domaine du
    subjectif) ;
  3. elle permet
    à l’ensemble des différents intervenants de se référer
    au même « catalogue » d’observation, aux
    mêmes items.
  4. elle permet
    de suivre l’évolution chiffrée sous traitement.

L’objectivation
des informations permet de convaincre certains médecins réticents. Le
score de douleur objective l’observation de l’infirmère, ces données
chiffrées aident le médecin à prescrire un antalgique adapté.
Il faut reconnaître néanmoins que l’usage d’une grille d’évaluation
peut sembler réducteur en comparaison avec l’observation clinique réalisée
tout au long d’une journée.
Les transmissions subjectives écrites dans le dossier de soins de type
« semble avoir mal » ou « douleur ++ » ne permettent pas,
elles, d’obtenir une prescription antalgique adéquate.

 


5/ Est-ce que seul le score de
douleur compte ?

Dans l’évaluation de la douleur,
toujours parcourir 3 étapes :

  1. observer
    ;
  2. comparer
    avec le comportement d’un enfant normal du même âge ou avec le comportement
    de l’enfant lui-même (avec l’aide des parents si possible) ;
  3. formuler l’hypothèse
    : y a-t-il douleur ?
    Cette « hypothèse douleur » est à confronter à l’avis des parents,
    au score obtenu sur la grille d’évaluation et éventuellement aux
    résultats d’un test antalgique (en cas de doute persistant, l’injection d’un antalgique puissant modifie franchement le comportement s’il s’agit effectivement de douleur).

 



6/
Puis-je utiliser n’importe quelle grille d’évaluation ?

Non, bien sûr.
Le choix de la grille d’évaluation se fait en fonction de l’âge et du
contexte de la douleur.
Exemple : en postopératoire, choisir l’échelle OPS ; en réanimation,
choisir l’échelle Comfort ; aux urgences, choisir l’échelle EVENDOL
; en néonatologie, choisir l’échelle EDIN. Il est nécessaire de choisir
une échelle validée dans cette indication.
Âge
Douleur
aiguë

Échelle recommandée
(seuil
de traitement)
Douleur
prolongée

Échelle recommandée
(seuil
de traitement)
Prématuré et nouveau-né
DAN (validée pour la douleur d’un soin) (3/10)
NFCS (adaptée aussi à la douleur d’un soin) (1/4)
PIPP (validée surtout pour la douleur d’un soin) (6-12/21)
EDIN (5/15)
0 à 2 ans
FLACC (seuil non défini)
AMIEL-TISON (5/20)
OPS (3/10 ou 2/8 si item « Pression
artérielle » absent)

EVENDOL : validation en cours en dehors des urgences
EDIN (outil validé pour le nouveau-né, mais utilisable par défaut dans
cette tranche d’âge)
(5/15)
EVENDOL : validation en cours
en dehors des urgences
2 à 7 ans
FLACC (seuil non défini)
OPS (3/10 ou 2/8 si item
« Pression artérielle » absent)

CHEOPS (validée
aussi pour la douleur d’un soin)
(9/13)
EVENDOL : validation en cours en dehors des urgences
DEGR (10/40)
HEDEN (3/10)
EVENDOL : validation en cours
en dehors des urgences
4 à 6 ans
Jetons
Visages FPS-R (4/10)
À
partir de 4 à 6 ans
Visages FPS-R (4/10)
EVA (3/10)
ENS (à partir de 8-10 ans et surtout à l’adolescence) (3/10)
Visages FPS-R (4/10)
EVA (3/10)
ENS (à partir de 8-10 ans et surtout à l’adolescence) (3/10)
Schéma du « bonhomme »
DEGR (validée jusqu’à 6 ans mais utilisable
au-delà en cas d’inertie psychomotrice (10/40)
SITUATIONS
Aux
urgences de 0 à 7 ans
EVENDOL (4/15)
En
réanimation de la naissance à l’adolescence
Comfort
Scale (24/40)
Comfort Behavior sans les items FC et PA (17/30)
Enfant
handicapé
Enfant connu
DESS (6/40)
PPP (14/60)
Enfant non connu
GED-DI (7/90)
FLACC (seuil non défini, 3 ou 4/10)

 



7/
Il n’y a pas d’échelle adaptée à mes patients (mon service), nous allons en
élaborer une.

Il n’est pas recommandé de pratiquer
ainsi car l’élaboration d’une échelle d’évaluation de la douleur est
un long travail comportant la sélection des items et la vérification
qu’ils sont appropriés (« validation ») par un recueil de nombreuses observations
et des test statistiques spécifiques. Choisissez l’échelle validée pour
la situation la plus proche de la vôtre (ex échelle Amiel-Tison
pour un bébé de 8 mois).

 



8/
Le résultat du score est-il toujours fiable ?

Le résultat est fiable uniquement
si le score utilisé est validé dans la situation où on l’applique. Ainsi,
une échelle de douleur aiguë utilisée dans un contexte de douleur prolongée
donnera des résultats non valides pouvant faire croire à l’absence de
douleur. Le résultat d’un score doit toujours être confronté à l’état
clinique et au « bon sens » du professionnel.

 



9/
Les parents peuvent-ils remplir les échelles d’évaluation ?

Oui, si les signes relevés par
le score leur ont été expliqués.

 


10/
Est-ce que le « remplissage » de la grille d’évaluation doit se faire à un moment
précis ? Au chevet de l’enfant ?

Non.
La grille peut être remplie au moment où l’on écrit ses transmissions
en tenant compte des dernières heures d’observation lors des soins courants.
Par contre, il est nécessaire d’avoir une vigilance constante concernant
la douleur à tout moment lors des soins.

 


11/ Combien
de fois par équipe faut-il évaluer ?

Les recommandations diffèrent
selon la situation.

  • En post-opératoire, l’évaluation
    systématique est conseillée à la même fréquence que la surveillance
    des autres paramètres vitaux.
  • Si tout va bien, s’il n’y
    a pas de douleur : une fois par équipe.
  • En cas de douleur : au minimum
    toutes les 4 heures.
  • Si une douleur forte est
    détectée, l’évaluation est répétée après l’administration de l’antalgique,
    au moment du pic d’action de celui-ci (30 à 45 min après s’il s’agit
    de voie orale ou rectale, 5 à 10 min après s’il s’agit de voie intraveineuse).
  • Plus la douleur est forte,
    plus l’évaluation est rapprochée pour suivre et adapter au mieux
    le traitement.