Dr V. Forin, L. Benoit (IDE) – Unité de rééducation pédiatrique
Dr B. Tourniaire (UFAP), Patricia Cimerman (IDE) – CNRD Hôpital Trousseau/Paris
I. INTRODUCTION
QU’EST CE UN BILAN URODYNAMIQUE ?
Le bilan urodynamique étudie le fonctionnement de l’appareil vésico-sphinctérien. Il comporte trois grandes étapes :
- la débitmétrie permet lors d’une miction la plus physiologique possible, d’étudier la qualité du jet urinaire,
- la cystomanométrie étudie les pressions intra-vésicales au cours d’un remplissage vésical à l’eau tiède. La cystomanométrie nécessite un sondage vésical urétral (T1) et un remplissage vésical (T2),
- le profil urétral mesure les pressions de clôture urétrale lors du retrait de la sonde (T3).
LES INDICATIONS
En pédiatrie, les indications du bilan urodynamique concernent trois grands chapitres :
- les troubles mictionnels fonctionnels: le bilan urodynamique n’est jamais effectué ni systématiquement, ni de première intention, mais seulement après analyse clinique et radiologique. Il permet de répondre aux questions non résolues,
- les vessies neurologiques acquises ou congénitales: le bilan urodynamique est indiqué plus pour le suivi que pour le diagnostic. Il permet un dépistage précoce des situations à risque pour le rein et aide dans le choix du traitement de la continence,
- les uropathies malformatives: le bilan urodynamique étudie en particulier les troubles mictionnels des valves de l’urètre postérieur chez le garçon. Il permet un bilan avant une chirurgie reconstructrice urinaire. Il est souvent indiqué avant une greffe rénale, pour éliminer un dysfonctionnement vésico-sphinctérien dangereux pour le greffon rénal.
LA DÉMARCHE D’ANALGÉSIE
Notre démarche pour l’analgésie a évolué au cours de notre expérience remontant maintenant à plus de 10 ans.
Au départ, nous avons utilisé les techniques de relaxation, la présence des parents étant systématique. L’examen se passe dans une atmosphère la plus calme et la plus ludique possible. Conscients de l’insuffisance de ces techniques, nous avons proposé chez le garçon une anesthésie urétrale au gel de Xylocaïne en respectant le délai nécessaire avant l’introduction de la sonde urétrale. Le garçon semble bénéficier largement de ce procédé.
Nous avons ensuite utilisé le MEOPA uniquement lorsque le sondage urétral était connu pour être difficile, en particulier chez les malformés à l’urètre coudé. L’utilisation du MEOPA est maintenant systématique depuis 2 ans depuis que le matériel est en permanence à notre disposition en salle d’urodynamique. Il est systématiquement proposé aux garçons et aux filles, dès que l’enfant est demandeur, même s’il est au sondage intermittent, par exemple dans le cadre d’une vessie neurologique.
II. OBJECTIFS DE L’ÉTUDE
- Évaluer la douleur et l’inconfort de l’enfant provoqués par l’examen.
- Noter le taux de satisfaction de l’enfant, des parents, des soignants et d’un observateur extérieur concernant le déroulement de l’examen.
III. MÉTHODOLOGIE
Nous avons conduit cette étude de janvier à mai 2003 dans le service de rééducation fonctionnelle de l’hôpital Trousseau sur 26 enfants (15 filles, 11 garçons) âgés en moyenne de 8 ans. Il s’agissait pour 17 d’entre eux d’un 1er examen, d’un 2e ou 3e bilan pour les 9 autres.
Les conditions de l’examen urodynamique étaient identiques aux conditions habituelles, les seules différences liées à l’étude étaient la présence d’un observateur extérieur pour l’évaluation. Des informations et explications sur l’évaluation de la douleur ( objectifs, manipulation de la réglette EVA) ont été données aux enfants et parents.
Une inhalation de MEOPA ( mélange protoxyde d’azote/oxygène) a été proposée à tous les enfants avant l’examen après lecture du livret d’information.
La durée d’inhalation moyenne a été de 9 minutes.
Une application de xylocaïne urétrale a été faite pour les garçons.
ÉVALUATIONS
- Avant l’examen (anticipation de la douleur, de la peur) chez les enfants et leurs parents.
- Aux 3 temps de l’examen (T1 : introduction de la sonde, T2 : remplissage de la vessie, T3 : retrait de la sonde urinaire).
OUTILS
Auto-évaluation
- EVA (échelle visuelle analogique de 0 à 10) utilisée par les enfants =6 ans.
- Poker Chip (4 jetons) utilisés par les enfants de 4 à 6 ans. (Chaque jeton représente un morceau ou une partie de douleur, on demande à l’enfant de prendre autant de jetons qu’il a mal. Score sur 4, seuil thérapeutique à 2.)
Hétéro-évaluation
- ENS (échelle numérique simple de 0 à 10) utilisée par le médecin, l’infirmière et l’observateur.
- Échelle CHEOPS (Children’s Hospital of Eastern Ontario Pain scale) utilisée par l’observateur. (Échelle comportementale à 6 items : Pleurs, visage, plaintes verbales, corps, mains, jambes. Score de 4 à 13.)
IV. RÉSULTATS
Évaluation anticipée chez l’enfant (n = 21/26)
- Très peu d’appréhension de l’examen (moyenne EVA : 2,6/10).
- Peur très modérée de la douleur (moyenne EVA : 2,8/10).
Évaluation anticipée chez les parents (n = 24/26)
- Pas d’inquiétude parentale pour l’examen, ni pour la douleur (EVA : 0,6/10, 0,2/10).
Autoévaluation de l’enfant. Moyenne EVA/jetons
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- Le retrait de la sonde est le temps le plus douloureux pour les enfants.
Hétéro-évaluation. Moyenne Échelle Numérique
IDE
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Médecin
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Observateur
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T1 : 0,7/10 | T1 : médecin non présent | T1 : 1/10 |
T2 : 0,1/10 | T2 : 0,3/10 | T2 : 0,3/10 |
T3 : 1,2/10 | T3 : 0,9/10 | T3 : 0,7/10 |
- Le retrait de la sonde est le temps le plus douloureux pour l’infirmière et le médecin, l’introduction de la sonde pour l’observateur.
Taux de satisfaction (%) vis à vis du déroulement de l’examen
DISCUSSION – CONCLUSION
L’utilisation du MEOPA pour le sondage urétral, lors d’un bilan urodynamique, apporte un confort indéniable aux enfants. Le taux de satisfaction et notre expérience personnelle le montrent. Une étude comparative évaluant la douleur, lors du bilan urodynamique, avec et sans MEOPA, nous semble éthiquement impossible à proposer. C’est pourtant peut être l’étude nécessaire pour convaincre le corps médical à utiliser cette technique.
Tout ne semble pourtant pas résolu pour assurer un confort total aux enfants. Une information préalable sur la technique du MEOPA lors de la prise du rendez-vous doit être faite pour optimiser l’acceptation de cette technique. Une tierce personne supplémentaire semble nécessaire pour détourner l’attention de l’enfant lors du geste douloureux et réserver à l’infirmière uniquement les gestes spécifiques du sondage stérile.
L’utilisation du gel de Xylocaïne urétral reste intéressante chez le garçon. La dilution du produit est à revoir pour éviter les picotements urétraux signalés dans la demi-heure suivant l’application.
Le retrait de la sonde voire la réintroduction pour réévaluer les pressions urétrales, est ressenti comme le temps le plus douloureux par l’infirmière et le médecin. Nous proposons de réutiliser le MEOPA à cette phase de l’examen. L’influence de ce produit sur les pressions urétrales est possible mais inconnue, aucune publication n’est retrouvée à ce sujet. Une étude comparative est à mener.
BIBLIOGRAPHIE
P. Schmit, M. Sfez. Prise en charge des manifestations anxieuses et douloureuse en uroradiologie pédiatrique.
J. Radiol., 1997 ; 78 : 367-372.