Plusieurs études cette année chez l’enfant atteint d’un handicap d’origine péri ou anténatale, de type « paralysie cérébrale » (PC, appelée autrefois IMC ou IMOC) (handicap moteur d’étendue variable plus ou moins handicap cognitif).
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Prévalence de la douleur
. Dans une étude au Danemark, le but était de déterminer la prévalence de la douleur (chronique et/ou prolongée) chez ces enfants et son interaction sur les activités physiques de loisir. 817 (sur 960 repérés grâce au National Danish Clinical Quality Database des enfants atteints de PC et à son programme national de suivi régulier) enfants âgés de 2 à 11 ans (âge moyen 6 ans), atteints de paralysie cérébrale à des degrés divers selon la classification GMFCS[1] ont été inclus dans cette étude : 52 % étaient GMFCS I, 33 % GMFCS II à IV et 15 % GMFCS V. Les résultats ont été colligés sur les dossiers de consultation systématiques, où les physiothérapeutes notaient si l’enfant avait une douleur chronique et s’il avait des activités de loisirs physiques. 36 % des enfants ont signalé la présence d’une douleur principalement au niveau des hanches, genoux et pieds. Pour les enfants des groupes I à IV, le pourcentage d’enfants douloureux était inférieur au pourcentage d’enfants non douloureux à l’inverse des enfants du groupe V. Par ailleurs, la douleur augmente avec l’âge. Plus la douleur est importante, moins les activités physiques sont possibles ; cependant au total 69 % des enfants avaient une activité de loisir physique, 58 % des enfants douloureux avaient néanmoins ce loisir, et 39 % des enfants pratiquant ce genre de loisir avaient des douleurs. Les auteurs signalent les limites de leur étude : pas d’évaluation de la douleur, ni des traitements antalgiques ou physiothérapie utilisés. Selon les pays européens et l’environnement social, les possibilités d’accès à des activités physiques (clubs sportifs…) pour ces enfants atteints de paralysie sont variables. Au Danemark selon leur étude, la conclusion est que « si 36 % de ces enfants présentent une douleur, 61,8 % ont des activités physiques ».
. En Suède, 95 % des enfants et des adolescents atteints de PC sont suivis dans le cadre d’un programme national de suivi (CPUP), qui comprend des données sur la douleur. Cette étude s’est portée sur la prévalence de la douleur en fonction de l’âge, du sexe, de la motricité globale et de la source de déclaration (personnelle ou par un tiers), l’intensité de la douleur (en 3 niveaux), le site de la douleur et l’importance de la perturbation du sommeil et des activités quotidiennes. 3545 enfants de 4 à 18 ans (2065 garçons) ont été inclus. La prévalence globale de la douleur était de 44 %, principalement dans les membres inférieurs, avec une tendance à une prévalence plus élevée chez les filles et avec l’âge (de 32 % à 4 ans, à 58 % à 18 ans), et en cas de niveau de GMFCS plus élevé. Les douleurs de la hanche et de la cuisse ainsi que les douleurs abdominales étaient associées aux douleurs les plus intenses. 36 % des douloureux trouvaient que la douleur perturbait leur sommeil souvent de façon importante, et 61 % leurs activités quotidiennes.
Stimulation cérébrale profonde pour la dystonie douloureuse
La dystonie est à la fois un symptôme clinique complexe et le nom d’un groupe de pathologies appelées dystonies, liées à un dysfonctionnement du système nerveux central (noyaux gris centraux). Les différentes dystonies (héréditaires, acquises ou idiopathiques), sont responsables d’altérations des fonctions motrices et non motrices, variables plus ou moins invalidantes. Devant l’importance de la gêne douloureuse, 140 enfants (3-19 ans) de ce centre londonien ont bénéficié de la mise en place (sous AG) d’une stimulation cérébrale profonde en 10 ans, dans le but d’améliorer leur qualité de vie. L’évaluation de la douleur, de l‘importance de la dystonie et de la consommation d’antalgiques avant et après la mise en place de la stimulation ont été suivies, ainsi que l’importance de la dystonie[2]. Les résultats ont mis en évidence l’efficacité de ce traitement dans toutes les formes de dystonie, avec cependant un moindre effet dans les dystonies héréditaires. Les douleurs dystoniques identifiées chez 63 (45 %) patients, (dont 38 % atteints de paralysie cérébrale), se sont améliorées chez 90 % des enfants et dans tous les sous-groupes étiologiques un an après, tandis que le score moteur (BFMDRS) s’est amélioré chez 70 %. Une amélioration statistiquement significative (p<0,01) de l’intensité de la douleur a été constatée pour l’ensemble de la cohorte : échelle numérique de la douleur (n = 27), échelle PPP[3] (n = 17) et questionnaire sur la qualité de vie[4] (n = 48), ainsi qu’une réduction du besoin d’antalgiques.
Les auteurs plaident pour que ce traitement assez novateur chez l’enfant ait une place dans l’arsenal thérapeutique (toxine botulique, chirurgie cérébrale centrale ou périphérique ou musculaire, baclofène, antalgiques, soins de confort…) mais il doit être encore évalué en termes de bénéfice-risque.
Une synthèse
Dans une synthèse, plusieurs spécialistes issus de plusieurs pays mettent l’accent sur les difficultés persistantes pour prendre en charge la douleur de ces patients souffrant d’handicap neurologique. Ils soulignent que malgré la disponibilité de plusieurs bons outils d’évaluation validés, leur utilisation en pratique est insuffisante. Le regard des soignants peut être perturbé par différents biais. Les connaissances sur la prévalence élevée de la douleur sont maintenant bien établies, mais de grandes incertitudes, inégalités et insuffisances de prise en charge subsistent. Enfin parmi les traitements, les thérapies psychologiques ne doivent pas être oubliées.
. Pain is frequent in children with cerebral palsy and negatively affects physical activity and participation.
Østergaard CS, Pedersen NSA, Thomasen A, Mechlenburg I, Nordbye-Nielsen K. Acta Paediatr. 2020 May 6.
. Pain in children and adolescents with cerebral palsy – a cross-sectional register study of 3545 individuals. Eriksson E, Hägglund G, Alriksson-Schmidt AI. BMC Neurol. 2020 Jan 11;20(1):15.
. Deep brain stimulation reduces pain in children with dystonia, including in dyskinetic cerebral palsy. Perides S, and al. Dev Med Child Neurol. 2020 May 9.
. Challenges in pain assessment and management among individuals with intellectual and developmental disabilities. Barney CC, Andersen RD, Defrin R, Genik LM, McGuire BE, Symons FJ. Pain Reports on line 2020, e821.
Commentaire Pédiadol
De nombreuses études ont mis en avant la problématique de la douleur chez ces enfants. Après l’évaluation, des mesures thérapeutiques sont nécessaires pour éviter ou diminuer ces douleurs, en mettant en œuvre des méthodes variées multimodales.
[1] La classification GMFCS est un système de classification de la fonction motrice cérébrale basé sur les mouvements volontaires (gross motor function classification system).
[2] La dystonie était évaluée par un score adapté, le BFMRDS (Burke-Fahn-Marsden dystonia rating scale).
[3] L’échelle PPP (Pediatric Pain Profile) est une échelle comportementale validée chez l’enfant atteint de handicap : voir sur pédiadol.
[4] Caregiver Priorities and Child Health Index of Live with Disabilities (CPCHILD).