La douleur a été définie par l’association internationale d’étude de la douleur (International Association for the Study of Pain IASP, 1979) comme une « expérience sensorielle et émotionnelle désagréable liée à une lésion tissulaire réelle, potentielle ou décrite en ces termes par le patient ».

Qu’est-ce que cela veut-dire ?

  1. La douleur est subjective, personnelle, posant immédiatement la nécessité d’une communication avec le soignant.
  2. La douleur n’est pas uniquement une sensation, c’est aussi une émotion.
  3. La douleur n’est pas proportionnelle à la gravité d’une lésion. Certaines lésions n’entrainent pas de douleur et il peut y avoir des douleurs sans lésion tissulaire.
  4. Est douleur ce que le patient décrit comme tel.  Seul le patient sait ce qu’il éprouve, c’est le patient qui devient l’expert !
Cette définition est mal adaptée pour ceux qui n’ont pas accès au langage, notamment les tout-petits. De ce fait, les altérations du comportement dues à un stimulus algogène sont considérées comme l’équivalent de la douleur. C’est pourquoi l’IASP a proposé une nouvelle définition en 2019, celle ci est parue en 2020! 

La douleur n’est pas un événement sensoriel isolé, mais en lien avec un contexte, une signification. D’ailleurs, classiquement, on distingue quatre composantes à la douleur, intimement intriquées et indissociables.

1. La composante sensori-discriminative

Elle correspond à l’ensemble des mécanismes neurophysiologiques aboutissant au décodage de la douleur comme

  • la « qualité » (par exemple torsion, étau, brulure, décharge électrique)
  • l’intensité, de faible à très intense…
  • la durée, le mode évolutif (fond permanent, crises paroxystiques)
  • la localisation, les irradiations.

Communiquer au soignant l’aspect sensori discriminatif de la douleur exige des mots souvent compliqués du vocabulaire analogique (acquis entre 6 et 12 ans) ; communiquer l’intensité exige de savoir se regarder, jauger sa douleur donc relativiser (acquis entre 4 à 7 ans). L’aspect sensoriel de la douleur est donc mal communiqué par les jeunes enfants.

2. La composante émotionnelle

Elle confère à la douleur sa tonalité désagréable, pénible voire insupportable. Les émotions liées à la douleur sont d’abord la peur, l’angoisse voire la panique, la colère parfois, la tristesse quand la douleur se répète ou se prolonge, voire la dépression. Les enfants sont très habiles à communiquer leurs émotions, dès la naissance cette aptitude leur permet de faire comprendre leur état émotionnel : cela passe par du non verbal (expression du visage, attitudes…). Lorsqu’ils ont mal, les enfants nous envoient donc d’abord un message émotionnel, c’est ainsi que le soignant peut passer à côté de la sensation de douleur et ne percevoir que la peur….

3. La composante cognitive

Par composante cognitive, on entend tout ce qui donne sens, interprétation, valeur à la douleur. Il s’agit donc de l’ensemble des processus mentaux capables d’influencer la perception de la douleur et des comportements qu’elle induit.
Quand on a mal, on analyse, on cherche la cause, les recours, en se référant à ses expériences antérieures, ses connaissances. Les jeunes enfants sont dépourvus de ces ressources et sont de ce fait envahis par la douleur.

4. La composante comportementale

Ensemble des manifestations verbales et non verbales observables chez le patient douloureux. Les jeunes enfants expriment tout par leur comportement, tout se lit sur leur visage ! Ainsi si le langage fait défaut, le comportement exprime la douleur.

Contrôler l’expression de son visage et de son corps s’apprend dans l’enfance. Chaque famille, chaque groupe ethnique utilise un comportement de douleur, plus ou moins riche et expressif ou à l’inverse contenu ! L’enfant intègre peu à peu ce comportement dans l’enfance.

Tous ces aspects jouent un rôle dans le ressenti.

Dans la perception de la douleur, interviennent aussi

  • une composante culturelle
  • une signification spirituelle
  • l’intégration dans la mémoire et le rappel de douleurs antérieures
  • l’impact sur l’entourage et
  • les mécanismes pour faire face (« coping »).

Ensuite cette perception peut modifier le ressenti des expériences suivantes… la douleur sensibilise à la douleur.

 

 

Mai 2019