Les injections de toxine botulique : tous ensemble pour réussir
in Les Journées Pédiadol, mars 2025

Dr Mathieu REBERT ,
Pédiatre, Institut Universitaire de Réadaptation CLEMENCEAU, Strasbourg

Malgré tous les progrès réalisés dans l’accompagnement des enfants porteurs d’affections neurologiques chroniques, la toxine botulique garde encore une place importante dans l’arsenal thérapeutique.
Pour rappel, sous le terme de « toxine botulique » on entend différentes classes de molécules qui s’administrent (principalement) par voie intramusculaire afin de diminuer de manière très locale la communication entre nerfs et muscles, et par là même de diminuer la contraction – souvent trop forte et donc trop gênante – des muscles (on les dits « spastiques »). Chez l’enfant on l’utilise généralement à partir de 2 ans avec jusqu’à 2 à 3 séances par an (les effets ne durent que quelques mois) lorsque la pathologie sous-jacente l’exige.
Les objectifs sont de 3 sortes : améliorer la motricité volontaire ; limiter les déformations pendant la croissance (qui seront responsables de douleurs si elles surviennent) et diminuer les douleurs de contracture si elles sont présentes.
Depuis l’année dernière, l’AMM a également été obtenue pour diminuer le bavage (on l’injecte alors dans les glandes salivaires).
Les séances d’injection demeurent un défi encore en 2025 pour 2 raisons principales :
– Il s’agit de faire des piqures, souvent plusieurs (1 à 2 par muscle jugé utile pour des séances qui peuvent concerner de un à une dizaine de muscles).
– Le geste s’adresse à des enfants, souvent petits (la raideur des muscles est maximale entre 2 et 6 ans) et dont les lésions neurologiques ne se limitent hélas pas à des répercussions motrices mais pouvant aussi être comportementales et/ou intellectuelles.

En Alsace et concernant la pédiatrie : nous avons fait l’an passé – à l’occasion de grands changements de l’offre de soins concernant les enfants en situation de handicap – une mise à jour complète de la manière d’envisager cette injection. Sans rien inventer mais en s’inspirant des différentes méthodes semblant fonctionner ailleurs.

Le travail a porté sur 3 domaines principaux :
Les moyens non médicamenteux :
Avec aux premiers rangs la présence parentale et les techniques de distraction gérées en grande partie par les soignant.e.s présent.e.s (à l’heure où l’on exige moins de personnel accompagnant pour les soins…). On ajoute également l’application de froid (blocs de glace ou cryo spray) qui inhibe pour partie la sensation de piqure. De manière générale ; ces moyens étaient déjà plutôt employés et il s’est agi de les encourager.
Les moyens médicamenteux :
On pense bien entendu au Meopa – indispensable ! – mais que rien n’oblige à utiliser tout seul. En 2023-2024 nos voisins portugais (Moreira Rodrigues & Beça) avaient publié une étude/sondage avec à la clé un encouragement plutôt marqué à utiliser des sédations « fortes », notamment chez les plus jeunes. Un des grands piliers du travail a été de proposer des prémédications variées pour des profils
qui le sont tout autant (antalgiques simples mais insuffisants, essentiellement morphiniques), « antistress » anxiolytiques (benzodiazépines, hydroxyzine) voire neuroleptiques, et même anesthésie générale (avec dans ce cas le support de l’anesthésiste). Il convient désormais – lors de la consultation en amont du geste – de fixer un protocole avec les parents et de bien expliquer les zones impliquées
(pour prévoir l’application de l’EMLA® déjà à la maison) etc…

L’évaluation :
Très modeste quand le projet a pris place ; il a semblé pertinent d’évaluer à la fois l’inconfort de l’enfant mais aussi le degré de contention. Pour la douleur, il faut régulièrement avoir recours à l’hétéro évaluation étant donné le public concerné.
La FLACC reste l’échelle la plus communément utilisée alors ; l’EVA ou l’échelle de visages FPS-R lorsque l’auto-évaluation est faisable.

Mise en oeuvre :
Ce triptyque ne peut se faire sans la collaboration de tous les acteurs (qui donne le nom à cette présentation) :
– Le parent : qui doit mener l’enfant à la consultation – gérer la prémédication – accompagner le geste et la distraction. C’est là peut-être le rôle capital, sans sous-estimer la responsabilité que nous faisons porter à des parents qui ont déjà la charge d’accompagner leur enfant dans beaucoup de domaines.
– Le soignant : qui doit faire preuve de tact pour aborder l’enfant ; présenter le MEOPA ; « désensibiliser » si besoin au préalable ; rester vigilant tout au long du geste pour évaluer l’efficacité ou non du protocole employé.
– Les cadres/la direction : devant faire leur possible pour permettre des doubles plannings permettant que suffisamment de personnes soient disponibles.
– Le médecin : qui doit essayer de trouver la bonne « recette » au départ.

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